Le président des réformés suisses pourra être un laïc

© Istock / Orla / © Istock / Orla
i
© Istock / Orla
© Istock / Orla

Le président des réformés suisses pourra être un laïc

25 avril 2018
Dans le dialogue œcuménique, être un ministre du Culte est un avantage. Mais les délégués de la Fédération des Églises protestantes de Suisse ont choisi de privilégier le principe protestant de l’égalité de tous les baptisés.

Peut-on être le représentant de la plus grande organisation protestante de Suisse sans être consacré?  Les délégués de la Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS) réunis en Assemblée se sont posés la question. Ils siégeaient depuis lundi pour achever la première lecture de la nouvelle constitution de la faîtière qui regroupe les différentes Églises réformées cantonales, l’Église évangélique méthodiste de Suisse et l’Église évangélique libre de Genève. Dès l’entrée en vigueur du texte, la FEPS deviendra Église évangélique réformée de Suisse (EERS).

«Nous estimons que pour la collaboration œcuménique, il est très important d’avoir une personne consacrée», a plaidé une déléguée défendant le texte proposé par le Conseil de la FEPS. «Si on veut que l’EERS soit prise au sérieux dans les discussions œcuméniques, il faut un président consacré. Et si l’on veut que l’Église ait un avenir, il faudra qu’on le construise de façon œcuménique!», a renchéri Sven Büchmeier de l’Église méthodiste.

Un autre son de cloche

Mais plusieurs autres Églises ont appelé à biffer cette exigence dans le choix du président ou de la présidente de la future organisation. «Hier, cette assemblée a décidé de se donner plus de liberté dans le choix du président et sur ce point nous voudrions faire le contraire. Le respect œcuménique que nous espérons ainsi gagner est-il vraiment important?», s’est interrogé Andreas Zeller, président du Conseil synodal des Églises Berne-Jura-Soleure (BeJuSo). «Nous sommes dans une période de cléricalisation de nos structures ecclésiales alors que du lac de Constance au lac Léman nous avons de la peine à trouver des ministres», a-t-il encore ajouté.

«Nous voulons différencier l’image que nous renvoyons à l’externe de ce que nous vivons en interne. C’est faux! Nous devons faire ce qui nous semble juste», a plaidé Ursula Stämmer de l’Église lucernoise, rappelant le principe protestant du sacerdoce universel qui affirme que tous les croyants sont égaux dans la mission de l’Église, ministre ou non. Elle a toutefois reconnu avec malice: «Et nous savons que nous n’allons jamais vivre le moment où, dans les faits, une personne non consacrée sera élue à la présidence.»

«Cela fait 15 ans que je suis responsable de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux dans mon Église. Je n’ai ressenti que rarement que je n’étais pas prise au sérieux, même en tant que femme laïque. Et les rares portes qui me sont restées fermées, par exemple avec les orthodoxes, auraient également été fermée à un ministre dont la consécration n’aurait pas été reconnue», a témoigné Pia Grossholz, conseillère synodale BeJuSo.

L’obligation faite d’être consacré a donc été biffée en première lecture du projet de Constitution. Le texte issu de la première lecture a été adopté à l’unanimité et la seconde lecture aura lieu en juin à Schaffhouse. Enfin, un vote final pourra avoir lieu six mois après, le 18 décembre si les délégués des différentes Églises membres parviennent à se tenir au calendrier fixé.

Bientôt un "président normal" à la tête des protestants de Suisse?

L’idée d’une présidence forte avait fait grincer des dents lors de la mise en consultation d’un avant-projet de nouvelle Constitution de la Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS). Il avait d’ailleurs déjà été surnommé «évêque des protestants», mais le lundi 23 avril, les délégués des différentes Églises membres ont porté les derniers coups de crayon pour biffer les prérogatives du président de la future Église évangélique réformée de Suisse (EERS) lors de la reprise de la première lecture du projet de constitution.

Le président de l’EERS sera élu pour un mandat de quatre ans, comme les autres membres du conseil. Par ailleurs, l’obligation qui lui était faite de prendre ce mandat à plein temps a également été retoquée. En fait, c’est vers davantage de liberté d’organisation que les délégués ont penché. «Il y a déjà assez de garde-fous dans ce texte. Il ne faudrait pas qu’une limite inscrite dans la constitution nous empêche d’élire un candidat qui fait l’unanimité», a plaidé Pierre-Philippe Blaser de l’Église réformée fribourgeoise. Les délégués ont, par ailleurs, renoncé à définir un nombre de membres minimum pour qu’une Église puisse demander son admission au sein de l’EERS.