Quel avenir pour la Réforme?

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Quel avenir pour la Réforme?

13 novembre 2017
Chronique
Michel Kocher, directeur de Medias-pro, revient sur l'entretien qu'il a mené auprès de Christoph Theobald, théologien jésuite qui s'interroge sur le rapprochement entre protestants et catholiques

Les 500 ans de la Réforme nous valent maintes publications, conférences et autres rassemblements ou prises de parole. Parmi ces dernières, il y a celles des représentants du catholicisme romain. Ils se montrent présents, attentifs, polis pour ne pas dire essentiellement bienveillants. 

Pour eux le moment est certes délicat, mais aussi très intéressant. Difficile de ne pas reconnaître l'importance de la Réforme, dont le catholicisme a grandement bénéficié pour entrer dans le monde contemporain. Impossible pour autant de renoncer à la spécificité de leur contribution au christianisme. De plus le protestantisme peut toujours être perçu -à tort ou à raison- comme une contestation de leur unicité. C'est donc sous une forme des plus distillée que leur différence se fait entendre. Que disent-ils?

À Lausanne le 31 octobre dernier lors d'une table ronde sur l'avenir de la Réforme, Christophe Theobald, l'un des théologiens catholiques les plus pointus, a montré comment le catholicisme contemporain pense positivement la Réforme. Sa démonstration est aussi claire que pertinente. D'abord, il en reconnaît l'apport unique, historiquement irremplaçable. Ensuite il intègre l'élan de la Réforme dans la propre dynamique romaine, autour des travaux du Concile de Vatican II. Il le fait autour du principe "Ecclesia semper reformanda est" (l'Église est toujours à réformer) qu'il s’approprie. Enfin il estime que le catholicisme est aujourd'hui appelé à penser autrement sa conviction d'être dépositaire d'une légitimité ecclésiale unique. Alors que nous vivons dans ce qu’il appelle l’âge de la laïcité triomphante, le jésuite appelle protestants et catholiques à un témoignage commun pour un vivre ensemble fraternel et apaisé.

Dans l'entretien qu'il nous a accordé, Christoph Theobald souligne aussi l'importance du geste accompli par le pape François. Ce dernier s’est rendu à Lund en Suède le 31 octobre 2016 pour s'associer au jubilé de la Réforme. Difficile de ne pas faire crédit au chef de l'église romaine, de signes nombreux envers les protestants. Difficile également de ne pas reconnaître que sa participation à un culte luthérien a une valeur particulière, du point vue ecclésial. À la Cathédrale Saint Pierre à Genève, lors d'une veillée de prières qui s’est tenue le vendredi 3 novembre, dans le cadre de la manifestation Reform’Action qui s’adressait aux cathécumènes réformés, le prieur de Taizé a fait de même, puis à posé la question: quels gestes de réconciliation êtes-vous disposés à poser, vous protestants?

Il faut s'accorder sur un type de visibilité ecclésiale en cohérence avec l'Évangile de Dieu
Christoph Theobald, théologien catholique

Qui peut répondre à cette question et quelle réponse donner? Peut-être aurait-il fallu le demander aux jeunes présents à Genève avant de laisser la parole aux spécialistes. Leurs réponses seraient sans doute intéressantes, voire même éclairantes sur les élans et les attentes oecuméniques des jeunes réformés.

Lors de sa conférence à Lausanne, Christoph Theobald a proposé une piste de réponse: il faut «s'accorder sur un type de visibilité ecclésiale en cohérence avec l'Évangile de Dieu.» Traduit, simplifié et un brin provocant à l'attention des protestants: Et s’il y avait dans la visibilité ecclésiale du catholicisme un service d'Évangile authentique et irremplaçable, que les protestants pourraient clairement reconnaître? 

Le rideau des festivités du 500e se referme. Le climat est incontestablement à la confiance. N'est-ce pas le bon moment pour poser de nouveaux jalons sur le chemin de la réconciliation? Par exemple, les autorités protestantes ne pourraient-elles pas signifier leur reconnaissance du ministère du pape, quand il défend, du haut de sa fonction, les valeurs de l'Évangile? C'est un service de visibilité évangélique mais aussi ecclésial. Qui sait, peut-être même que le pape François pourrait y trouver des arguments pour faire quelques pas de plus et renforcer le cercle vertueux de la réconciliation?

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