Une Église distancée qui réapprend à se faire proche

© Matthieu Paillard
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© Matthieu Paillard

Une Église distancée qui réapprend à se faire proche

Philippe Golaz
30 avril 2020
Distance
Devoir faire Église à distance est une occasion de revoir certains de nos présupposés de ce qui fait l’Église, et de relire Paul avec un regard nouveau.

«Toute réunion d’Église est suspendue jusqu’à nouvel ordre.» Il a suffi de quelques mots pour ébranler des communautés entières et pour nous faire entrer dans un temps bien étrange où, bien que vivant proches les uns des autres, nous ne pouvons plus nous rencontrer comme nous en avions l’habitude. Nous tenions pour acquis tous ces rendez-vous qui rythmaient nos semaines: le culte dominical, les rencontres de prière, de partage biblique, de méditation, les séances de Conseil et les Assemblées de paroisse. 

Bien plus, nous étions attachés à une ecclésiologie présentielle, qui ne faisait que peu de place à une Église à distance, et celle-ci s’est retrouvée en grandes difficultés dans cette situation inédite. L’église était un lieu, et nous n’étions l’Église que lorsque nous étions dans ce lieu. Lorsque ces lieux nous ont été fermés, nous avons dû revoir toute notre ecclésiologie. Mais alors que nous nous retrouvons confinés dans nos appartements, parfois exigus, je découvre sous un nouveau jour les lettres de Paul, et en particulier celles de captivité. Il témoigne dans ses lettres d’une grande intimité avec «ses» communautés, et pourtant, il a été à de nombreuses reprises forcé de vivre en isolement, en confinement. Mais cela ne l’a pas empêché de se sentir proche de ses frères et soeurs dans la foi, notamment grâce aux moyens de communication les plus aboutis de l’époque: la lettre et le messager. 

Depuis sa prison, il écrit aux Philippiens ceci: «Dieu m’en est témoin: j’ai le désir de vous voir, car je vous aime avec la tendresse de Jésus-Christ.» (Phil. 1:8 NFC). Que ce verset reflète mon sentiment aujourd’hui! Très certainement que si Paul avait eu à sa disposition les moyens que nous avons pour palier l’absence, il ne se serait pas gêné. Le christianisme est né et s’est constitué dans une situation de distanciation sociale. Les premières communautés étaient des communautés de maison. 

En tant que pasteur, je me retrouve dans une position similaire à celle de Paul, à devoir prendre soin de ma communauté à distance. Nous parlons d’un retour progressif à la normale. 

La question qui se pose est: un retour à la «normale» en Église est-il réellement souhaitable? Et si, au milieu de cette crise, l’Église trouvait un nouveau souffle, à l’image de celui donné par Paul?

Comme prière, je vous propose une paraphrase
des premiers versets de l’épître de Paul
aux Philippiens. Une lettre pleine de douceur
que l’apôtre adresse à une Église qu’il attend
de revoir avec impatience.

O, Dieu notre Père,

Je te rends grâce pour nos communautés,
qui s’efforcent de diffuser la Bonne Nouvelle de la
Résurrection, en sortant de leur zone de confort.

Que notre amour grandisse de plus en plus,
et qu’il nous aide à discerner le bon et le vrai alors
que nous tâchons de poursuivre notre mission.

Aide-nous ainsi à faire les bons choix, afin d’être
trouvés purs et sans défauts au retour du Christ.

Que nos actions, dans le monde virtuel et réel,
soient des actions de justice pour la louange
et la gloire de Dieu.

Amen
Prière

L’actualité décryptée par un jeune théologien

Le bon prédicateur doit avoir la Bible dans une main et le journal dans l’autre, selon une formule attribuée au théologien Karl Barth. Chaque mois, la rédaction met au défi un ou une jeune ministre de décrypter l’actualité avec les outils de la théologie. 

L’auteur de cette page 

Philippe Golaz est pasteur à Meyrin. Il se découvre depuis peu en tant que papa, mais avoue continuer à apprécier, de temps en temps, quelques gorgées d’un bon single malt.

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