Une pasteure sort la tronçonneuse

La pasteure Kathrin Bolt découpe une chaire d'église. / DR
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La pasteure Kathrin Bolt découpe une chaire d'église.
DR

Une pasteure sort la tronçonneuse

Andreas Bättig, ref.ch, le portail des réformés
14 janvier 2022
Une pasteure alémanique a décidé de scier une vieille chaire d’église pour en faire une table autour de laquelle elle souhaite inviter les jeunes de sa paroisse. L'objectif? Sortir du monologue pastoral et encourager le dialogue.

Il y a quelques semaines, la pasteure alémanique  Kathrin Bolt a troqué sa robe pastorale contre de lourds vêtements de protection. Elle a ensuite actionné une tronçonneuse, qui s’est mise à vrombir bruyamment au cœur de  la maison de paroisse de Straubenzell, un quartier de Saint-Gall. L’officiante ne s’est pas arrêtée là: elle a placé la chaîne dentée sur une vieille chaire d’église mobile et l’a sciée en deux, de manière déterminée.

«C'était un peu douloureux», raconte-t-elle, quand on l’interroge. «Mais il y avait aussi quelque chose de libérateur dans le fait de pouvoir scier une telle chaire, symbole d’une vieille tradition», ajoute-t-elle. C’est que selon la pasteure, il faut aussi savoir lâcher prise de temps en temps: c'est la seule façon d'obtenir des changements.

Cultes sans prédication

L'ancienne chaire ne doit d'ailleurs pas devenir du bois de chauffage, mais remplir une fonction toute particulière et nouvelle: l'équipe pastorale, en collaboration avec des jeunes et un menuisier professionnel, construira une table à partir de la chaire au cours des prochaines semaines.

C'est autour de celle-ci que les paroissiens se réuniront quatre dimanches en février pour discuter et prendre la cène ensemble. Le projet «Cultes sans prédication», qui en est déjà à sa deuxième édition, est à l'origine de cette initiative. Dans ce cadre, les pasteurs renoncent à prononcer une prédication.

«Nous voulons nous éloigner du monologue et nous rapprocher de la communauté de la table», explique son collègue, le pasteur Uwe Habenicht. Car au sein du collège pastoral, on s'accorde à dire qu'il faut développer des formes de communication religieuse plus surprenantes et plus variées. «Pour beaucoup, la prédication n'est plus adaptée à notre époque», explique-t-il. Celle-ci semble «venir d'en haut» même si le pasteur n'est plus en chaire. Les habitants du quartier, en revanche, veulent rencontrer les membres de leur église d'égal à égal.

Initiative également artistique

Ce n'est pourtant pas un pur hasard si Kathrin Bolt s’est saisie d’une tronçonneuse pour le projet «Cultes sans sermon». La pasteure a en effet été nominée sur Facebook pour le «défi de la tronçonneuse»  lancé par les artistes conceptuels Frank et Patrik Riklin. La tâche consistait à découper un morceau de réalité à l'aide d'une tronçonneuse et à le réassembler dans un nouveau contexte. «La chaire s'y prêtait parfaitement», explique la pasteure.

Uwe Habenicht est conscient que l'action de la tronçonneuse n'a pas été bien accueillie par tous. Mais à notre époque, l'église peut, voire doit, irriter. «Si nous ne le faisons pas, nous ne ferons que ressembler à un musée», formule-t-il.

De son côté, Kathrin Bolt est convaincue que beaucoup estiment également beau que la chaire devienne une table. «Une table représente tant de choses. On y mange, on y vit, on y lutte. On y rit et on y pleure. On s'y assoit seul, en famille ou  avec des amis.»

Une fois les travaux terminés, la table (et donc la chaire transformée) trouvera sa place dans le jardin du presbytère. Là, les intempéries la grignoteront jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien ou qu'elle puisse redevenir autre chose.