Un jubilé presque oublié

Ulrich Zwingli, d'après Georg Osterwald (1803–1884) / ©Domaine public, Wikimedia Commons
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Ulrich Zwingli, d'après Georg Osterwald (1803–1884)
©Domaine public, Wikimedia Commons

Un jubilé presque oublié

Commémoration
La première dispute de Zurich a eu lieu le 29 janvier 1523. Ce débat à la fois théologique et civil a été suivi par une seconde rencontre en octobre de la même année, qui a conduit pour la première fois à l’adoption de la Réforme dans un canton suisse.

«En Suisse romande, il y a eu, dès le XVIIe siècle, une survalorisation de Calvin au détriment de Zwingli», estime Bernard Reymond. Ce professeur honoraire de la Faculté de théologie de Lausanne reconnaît n’avoir lui-même pris le temps de s’intéresser à ce réformateur qu’après avoir eu le sentiment d’avoir «fait le tour» d’autres figures marquantes de l’histoire protestante. Il constate: «L’Institution de Calvin est facilement disponible dans différentes éditions, alors que l’accès aux textes de Zwingli ou de son successeur Bullinger restait plus difficile pour les Romands. Peut-être en raison de l’influence de la France. Depuis Genève, Calvin a fortement marqué l’Hexagone.» Mais il ne faut pas oublier l’importance de Zwingli dans les autres cantons romands. «L’Eglise réformée vaudoise, jusque dans sa mentalité et ses structures institutionnelles, garde la trace de Zwingli: c’est Berne, alors dominateur du Pays de Vaud, qui y a amené la Réforme», rappelle le théologien vaudois.

Zwingli a été influencé par les difficultés de ses fidèles

«Alors que Calvin, juriste de formation, accordait beaucoup d’importance au contrôle de la société, Zwingli, d’abord prêtre à Glaris, a été plus influencé par les difficultés rencontrées par les fidèles de sa paroisse. Il prendra ainsi tour à tour position contre les indulgences ou le mercenariat», relate Bernard Reymond. «De même, Zwingli s’opposa fermement à ce qu’un prêtre ou un pasteur puisse interdire à un croyant l’accès à la communion. Bien sûr, les ministres devaient assurer leur rôle de bon berger et, le cas échéant, prévenir les croyants, mais non se faire juges ou censeurs des convictions de chacune et chacun.» Bernard Reymond précise pourtant: «Il y avait malgré tout une forme de contrôle moral exercée par les Consistoires. A Genève, le Consistoire était (et est encore) un organisme de gouvernement ecclésial, tandis que dans les autres cantons de tradition protestante ils étaient avant tout des instances civiles, veillant au bon comportement de tout un chacun.»

Après le scandale suscité par une consommation ostentatoire de viande en plein carême 1522, acte dont Zwingli avait défendu la légitimité dans un sermon, l’autorité civile a convoqué et dirigé la dispute de religion du 23 janvier 1523. Elle engageait donc la société civile, mais à propos de questions éminemment théologiques: celles-là mêmes qui ont été au cœur de la Réformation. A Zurich, ce jubilé ne sera toutefois pas fêté en grande pompe cette année, le canton ayant déjà célébré l’arrivée du réformateur et ses débuts de prédicateur dans cette ville en janvier 1518.

Pour célébrer le jubilé des disputes, le Centre culturel des Terreaux à Lausanne, en partenariat avec Réformés, organise le 2 mars 2023, à 19h00, une projection du film Zwingli, le réformateur, de Stefan Haupt, suivie d’une table ronde (www.terreaux.org).

Ce film est également disponible sur Play Suisse, la plateforme gratuite de streaming de la SSR (www.playsuisse.ch).