Berlin: « La révolution est partie des Eglises »

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Berlin: « La révolution est partie des Eglises »

14 octobre 2009
Berlin - La rapidité avec laquelle le mur est tombé est le dernier pied de nez que les dirigeants est-allemands ont joué aux opposants, estime Solange Wydmusch à ProtestInfo, sociologue des religions, installée à Berlin. Ceux-ci avaient encore besoin de 6 mois à un an pour peaufiner leurs projets, une alternative au système de l'Ouest.

Le rythme adopté pour le changement a été extrêmement rapide, pour ne pas dire brutal. En moins de 12 mois, l'Allemagne a été réunifiée. Après la chute du mur le 9 novembre 1989, l'ex-RDA a perdu dans la foulée sa monnaie, ses entreprises. En quelques jours, quelques semaines, les Allemands de l'Est ont vu s'effondrer tous leurs repères: « cela a été d'une violence inouïe! »
Cette situation est inédite, comparée à celle d'autres pays comme la Pologne. Dans ce pays, le passage d'un système à l'autre s'est fait beaucoup plus lentement.

Pour revenir à la RDA peu avant le changement de régime, les opposants se sont rassemblés sous le toit des Eglises, mais sans aucun lien avec la foi pour la plupart, estime la sociologue. Beaucoup d'entre eux se sont rapprochés des Eglises, car elles offraient l'un des seuls lieux de liberté de parole. Ce sont d'ailleurs dans les Eglises que les critiques contre la Stasi, la police secrète, ont commencé, selon elle. L'Eglise a servi de matrice aux futurs partis politiques

Avec la chute du mur, les Eglises de l'Est ont offert parmi leurs meilleurs acteurs à la politique. Beaucoup de pasteurs sont entrés dans le gouvernement de transition de Lothar de Maizière. Cet homme a été le dernier premier ministre de la RDA du 12 avril au 2 octobre 1990, après les premières élections libres en RDA. Les pasteurs, ces professionnels de la parole, ont également été propulsés à la tête de « tables-rondes », à l'instar du pasteur Johannes Gauck, responsable de la commission de dissolution de la Stasi.

Si politiquement, le système de l'Ouest l'a emporté, cela a aussi été le cas pour les Eglises. « Elles se sont faites annexer de la même manière que l'Etat », considère la sociologue française. L'Eglise a d'ailleurs changé de rôle. Les idées de protestation ont été perdues en route, juge-t-elle.

Le changement pour les Eglises protestantes a été radical. D'une Eglise de militants, elle a endossé le costume d'une Eglise d'Etat, financée par l'impôt. « Ceci a aussi joué un rôle dans la défection des cultes », selon elle.

Du jour au lendemain aussi, les pasteurs ont changé de statut. Tandis qu'ils faisaient partie de la  marge, ils se sont retrouvés propulsés au sein de l' «establishment» avec des salaires supérieurs au reste de la population.

Avant la chute du mur, les Eglises ont été les seules à pouvoir accueillir les groupes de la société civile, qui cherchaient des pistes pour améliorer le système de la RDA ou pour en changer. Depuis le changement de régime, les partis politiques notamment ont pris le relais. Et les Eglises on retrouvé leur rôle traditionnel dans une société largement sécularisée.