L'Europe, une chance pour le christianisme

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L'Europe, une chance pour le christianisme

Michel Kocher
8 mai 2012
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Et si s'opérait lentement mais clairement, un renversement ? Ce n'est plus tant le christianisme qui fait l'Europe, mais l'Europe qui va refaçonner le christianisme de notre hémisphère. Des centaines de groupes et mouvements chrétiens s'apprêtent à faire l'inventaire de tous leurs apports le 12 mai prochain dans différents coins du continent. Ils seront reliés par satellite à une manifestation centrale à Bruxelles.


« Ensemble pour l'Europe » est une manifestation organisée par 250 communautés chrétiennes et mouvements religieux. Y dominent des groupes catholiques plutôt conservateurs (le Verbe de Vie, les Equipes du Rosaire...), même si des mouvements moins connotés sont aussi de la partie (Pax Christi, l'ACAT). En France, la Fédération Protestante de France se trouve aussi sur la liste de ces organismes prêts « à vivre un pacte d'amour avec les autres Mouvements et Communautés ».

En Suisse, la réunion annoncée à St-Loup chez les diaconesses protestantes rassemblera tout le spectre théologique imaginable pour diffuser « un esprit de communion profonde ». C'est en soi une performance. Personne ne songerait le moins du monde à critiquer une telle réussite et de si nobles intentions, ni même à les soupçonner de vouloir rechristianiser l'Europe. Après tout, l'absence, voire le déni des racines chrétiennes dans l'Union européenne, a de quoi mobiliser des inquiétudes ou tout au moins faire débat.

« Que tous soient un »

D'ailleurs, le coeur du rassemblement ne semble pas se nouer autour de revendications de type identitaire. Il est question de répondre à l'appel du Christ, « Que tous soient un » et de lister les contributions que les chrétiens peuvent apporter à l'Europe. A l'heure où l'oecuménisme institutionnel semble se résumer à un naïf retour à Rome, où la sécularisation passe des seuils encore jamais atteints, on en vient à se demander si l'Europe n'est pas au fond une chance pour le christianisme.

Et si l'Europe devenait un moteur d'unité et de renouveau, plus mobilisateur que les sempiternels appels ecclésiastiques à l'Unité ou les visées hégémoniques de la papauté?

Et si l'Europe devenait un moteur d'unité et de renouveau, plus mobilisateur que les sempiternels appels ecclésiastiques à l'Unité ou les visées hégémoniques de la papauté ? Et si l'Europe n'était pas en mesure de mobiliser, comme la KEK (1) ou la CCEE (2) ont mobilisé ces dernières décennies, de Bâle en 1989 à Sibiu en 2007 ? Un rassemblement ecclésial de la base, apportant aux Eglises ce que la société civile apporte à l'Etat. Une multitude de réseaux qui tissent autant de contributions, d'engagements et de convictions... qu'il y a de membres.

Si l'Europe est une chance pour le christianisme, ce n'est pas parce que le projet européen garderait en son noyau le potentiel d'une terre promise. Ni la situation économique actuelle, ni la mémoire du passé ne l'autorisent à de telles rêveries. La chance européenne est plus prosaïque. Elle se résume en quelques points de nature géopolitique.

Equilibre des forces confessionnelles

D'abord l'Europe dicte au christianisme un équilibre des forces confessionnelles. Aucune des trois confessions n'a réellement de chances de dominer sur les autres, même si le catholicisme y est majoritaire. Elles sont condamnées à cohabiter... et à faire de la place à l'islam. La papauté ne pourra y jouer le rôle fédérateur que lui confèrent son histoire et sa place au coeur du continent qu'à la condition de se présenter comme un service et non comme un pouvoir.

Ensuite, l'Europe dicte au christianisme un agenda des priorités. Crise économique, déficit démocratique, domination non contrôlée des multinationales et de la finance, intégration des migrants, la liste s'impose d'elle-même pour toutes les forces diaconales, militantes dans le service pour autrui et les esprits critiques. Dans cet agenda, les querelles de mitres et de clocher, les discussions byzantines prennent la place qui leur revient, sans doute pas la première.

Enfin l'Europe donne au christianisme un contexte aussi incontournable que paradoxal. Une religion majoritaire sur le papier mais minoritaire dans sa pénétration spirituelle. Autrement dit le christianisme reste la religion majoritaire mais cette place ne lui offre plus guère d'immunité contre le sentiment de sa propre fragilité. Ce que l'Europe offre au christianisme, c'est l'occasion, unique dans son histoire, de pouvoir exprimer sa vocation de service et d'interpellation, sans aucune arrière-pensée de recréer un corpus christianum, une forme de société chrétienne établie.

Notes et liens

(1) Conférence des Eglises Européennes
(2) Conseil des Conférences Episcopales Européennes

Plus d'informartions sur le détail et les intervenants (à Bruxelles et Saint-Loup) de la journée du 12 mai sont accesssibles depuis le site de la Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud.
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