Sept nouveaux ministres formés à l’aumônerie d’urgence

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Sept nouveaux ministres formés à l’aumônerie d’urgence

Joël Burri
20 août 2015
Au côté des services d’urgence, des groupes de ministres ou psychologues peuvent intervenir pour venir en aide aux familles de victimes d’accidents violents ou aux personnes ayant vécu des évènements choquants.

Photo: CC(by-nc-nd) Ruin Raider

Policiers et ambulanciers sont régulièrement confrontés à des situations de détresse humaine. Qu’il s’agisse de venir en aide à des victimes de violence ou d’annoncer à une famille la mort d’un des leurs à la suite d’un accident ou d’un suicide, dans la plupart des cantons les services d’urgence peuvent s’appuyer sur un réseau de soutien.

Sept ministres issus de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV), de l’Eglise réformée évangélique du canton de Neuchâtel (EREN) et de l’Eglise catholique vaudoise ont terminé cet été leur formation en Aide spirituelle et psychosociale en cas d’urgence (ASPUR). Une formation continue menée sur trois ans auprès de l’Office protestant de formation (OPF) qui prépare les ministres à intégrer un réseau de soutien.

Difficile de parler d’«aumônerie d’urgence», puisqu’en fait les diacres et pasteurs sont souvent très minoritaires dans ces structures. Fédéralisme oblige, chaque canton a mis un système différent, faisant tantôt appel à des psychologues, tantôt à des aumôniers. Ainsi si les réseaux d’aide de Berne, Genève et Neuchâtel, par exemple sont composés de personnes issues de différents horizons, dans le canton de Vaud, c’est aux Eglises que la gendarmerie a fait appel pour mettre en place une telle structure, sauf à Lausanne, où la police municipale a fait appel à des psychologues.

Aider les personnes en détresse à mobiliser leur réseau

«Mais que l’on soit pasteur ou psychologue ne change pas fondamentalement notre façon de travailler dans une situation de crise», constate Line Dépraz, conseillère synodale de l’EERV et membre de l’Equipe de soutien d’urgence du Canton de Vaud. «En effet, il ne s’agit pas d’avoir une relation de longue durée avec les personnes auxquelles nous venons en aide, mais bien d’être là en période de crise pour les aider à mobiliser leur propre réseau, à trouver les aides qu’ils pourront solliciter et à trouver leur autonomie face au drame qui les touche.» Pour David Allisson, pasteur de l’EREN qui vient de terminer sa formation ASPUR, «ce soutien relève avant tout de la solidarité humaine.»

D’ailleurs, quand elle se présente, Line Dépraz ne se présente pas comme pasteure, mais comme membre de l’équipe de soutien. «Bien sûr, il arrive qu’au cours de la discussion on me demande quelle est ma profession, mais chez certaines personnes le simple fait de se présenter comme ministre est un obstacle pour entrer en relation. D’ailleurs, les psychologues du service lausannois avec qui j’ai pu discuter font pareil. Le terme “psy” provoque chez certaines personnes des blocages similaires.»

Peu importe le canton, le principe est le même. Un groupe de personnes formées sont mobilisables par les services d’urgence suivant un tournus de période de gardes. «Sur Vaud, nous sommes en léger sous-effectif. Nous ne pouvons pas avoir, en permanence, une personne de piquet dans chacune des quatre régions du canton, mais nous nous engageons à intervenir à tout moment en 1 heure», explique Line Dépraz.

Pas de double journée pour les Bernois

Seuls les Bernois sont mieux lotis. «Les personnes de piquet sont disponibles aux centrales d’ambulance de Bienne et Berne», explique Pierre-André Kuchen, chef adjoint du «Care Team» bernois, et intervenant dans la formation ASPUR. «En 2004 et 2007, les autorités ont inscrit ce service dans la loi. Le Care Team dépend de la sécurité civile. Les intervenants sont donc sous le régime de la protection civile.» Comme des membres de la protection civile, durant leurs jours de piquet, les intervenants sont libérés de leurs obligations professionnelles et leurs employeurs sont indemnisés par l’assurance perte de gain.

Autre différence entre Berne et les autres réseaux romands: dans ce canton, le tournus des gardes ne se fait pas entre une vingtaine de personnes formées, mais entre 160 intervenants. Issus des métiers de la santé, des Eglises et de la psychologie, ils suivent une formation de trois ans, dont l’OPF s’est inspiré pour créer l’ASPUR. Le «Care Team» de Berne est, en effet, la seule entité du Réseau national d’aide psychologique d’urgence (RNAPU) a être à la fois organe de formation et d’intervention. Davis Allisson résume: «La formation dure trois ans. Il y a des cours durant les deux premières années, mais dès la troisième année, nous sommes appelés à participer à des interventions. D’abord accompagné, puis seul». Il a ainsi rejoint depuis quelques mois le tournus neuchâtelois, géré par la protection civile neuchâteloise depuis quelques mois déjà et a été appelé deux fois.

Pierre-André Kuchen explique l’importance particulière apportée par son canton à ce service: «Le Canton de Berne a pris conscience de la nécessité d’un tel service à la suite du drame de Saxetenbach. Une vingtaine de jeunes avaient péri lors d’un accident de canyoning. La prise en charge des familles avait alors été un véritable défi pour les secours. Cette prise de conscience a mené à la création du Care Team bernois. Les diverses instances politiques et ecclésiales ont travaillé à une convention régissant le mode de fonctionnement de l’entité bernoise.»

Un véritable besoin

Pour Line Dépraz également, l’existence de telles structures répond à un véritable besoin pour les professionnels des services d’urgence. «Nous constatons qu’une relation de confiance se crée entre la communauté des “feux bleus” et l’équipe de soutien d’urgence. Ils commencent à faire de plus en plus régulièrement appel à nous. Ainsi ces dernières années, nous avions une centaine d’interventions annuelles sur le canton de Vaud. Cette année, nous en sommes déjà à 120.»