"Le pélerinage nous ouvre au dialogue avec d'autres traditions religieuses"

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"Le pélerinage nous ouvre au dialogue avec d'autres traditions religieuses"

3 mai 2013
Jérusalem (epd - ProtestInter) Une rencontre internationale sur le pèlerinage «vert» vient de se terminer à Jérusalem. Christian Rutishauser, le Provincial des jésuites de Suissse, âgé de 47 ans est parti, le jour de l’Ascension 2011, du village suisse d’Edlibach (ZG). Il a fait le chemin dans un groupe de quatre personnes, composé de deux hommes et de deux femmes.

epd: Un congrès international sur le thème du pèlerinage «vert» vient de se terminer à Jérusalem. Comment pourriez-vous résumer cette rencontre?

Christian Rutishauser: Ce congrès a réuni des gens très différents qui, sans cela, ne se seraient peut-être jamais assis à la même table: des représentants d’Églises, des personnes qui suivent un chemin spirituel, d’autres qui ont des responsabilités publiques et des gens qui sont engagés dans le domaine de l’environnement.

Ensemble, ils se sont demandé comment on pourrait concevoir le pèlerinage de telle sorte qu’il soit encore plus enrichissant pour les pèlerins eux-mêmes, tout en constituant une apport positif pour la ville de Jérusalem. Je suis particulièrement enthousiasmé par la diversité des points de vue qui se sont exprimés dans ce congrès. C’est le caractère interdisciplinaire de la rencontre qui a été pour moi l’élément le plus important.

epd: Estimez-vous que Jérusalem est le lieu idéal pour un dialogue interreligieux qui vous tient personnellement tant à cœur? Ne vaudrait-il pas mieux mener le dialogue entre les religions loin d’une ville aussi disputée?

Christian Rutishauser: Le dialogue interreligieux n’est pas une option. Il ne s’agit pas de savoir si nous voulons discuter ou non. Nous vivons dans un monde global, où on ne peut considérer les religions que dans leur délimitation les unes par rapport aux autres et dans leurs liens réciproques. Dans tous les cas, Jérusalem est un lieu où le dialogue doit se développer. Car beaucoup de gens viennent ici pour renforcer leur tradition et leur identité propres.

À cet égard, il est très important qu’ils ne le fassent pas aux dépens des autres, mais qu’un esprit d’ouverture se manifeste parallèlement au renforcement de l’identité individuelle. Nous ne devons pas craindre la tradition de l’autre qui est aux côtés de la nôtre; c’est de cela qu’il s’agit, et c’est cela aussi qui est en jeu à Jérusalem.

epd: Le Suédois Jorgen Nilsson a achevé récemment sa marche jusqu’à Jérusalem. Vous avez fait vous-même, il y a un peu plus longtemps, le pèlerinage à pied du lac de Zoug à Jérusalem. Pourquoi un tel pèlerinage est-il important pour vous personnellement, et dans quelle mesure peut-il être aussi un travail de promotion de la paix?

Christian Rutishauser: Notre pèlerinage de l’Europe à Jérusalem était placé sous trois signes: d’abord, le pèlerinage est toujours quelque chose de spirituel, de religieux, qui change celui qui l’entreprend et l’incite à se concentrer sur l’essentiel dans la vie. On est confronté à des étrangers, on doit sans cesse chercher un toit. On apprend ainsi la simplicité, la joie de recevoir l’hospitalité, de faire route ensemble.

Ensuite, Jérusalem est un lieu central pour la religion chrétienne, mais aussi pour le judaïsme, un lieu très important également pour l’islam. En tant que pèlerin à Jérusalem, on rencontre l’autre, qu’on le veuille ou non. Même s’il n’est pas toujours au premier plan quand on est en chemin, l’ouverture à la rencontre est permanente. Ainsi, le pèlerinage nous ouvre au dialogue avec d’autres traditions religieuses. C’est cet aspect interreligieux dans l’approche du spirituel que nous voulons exprimer par le pèlerinage.

Au Moyen âge, les chrétiens partaient pour le Proche-Orient dans l’intention de faire la guerre. Aujourd’hui encore, il y a l’intifada et d’autres dissensions. Les gens se rendent dans les Lieux Saints, et c’est précisément là que le conflit commence, d’où la question: comment le pèlerinage peut-il vraiment contribuer à la paix? Je pense que le pèlerin apprend avant tout à approcher l’étranger, ce qui est la condition fondamentale de tout travail en faveur de la paix. (FNA-31)