L’évêque épiscopalien, Gene Robinson, démissionne

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L’évêque épiscopalien, Gene Robinson, démissionne

16 novembre 2010
Dimanche matin, je lis le New York Times. J'y ai appris récemment que

l’évêque épiscopalien, Gene Robinson, va démissionner en 2013. Consacré en 2003, Robinson était le premier évêque de l’Église épiscopalienne à vivre ouvertement son homosexualité ; ce choix a provoqué une vague de protestations dans les églises de tradition anglicane où les risques de schisme sont encore palpables.
Chronique par Muriel Schmid

Robinson portait un gilet pare-balles lors de sa cérémonie de consécration et il a reçu des menaces de mort depuis lors sans discontinu. Le New York Times souligne que sa démission inattendue est due en partie à ces pressions incessantes qui ont failli le détruire. Bien entendu, l’ampleur de cette bataille révèle une guerre théologique plus profonde entre les églises conservatrices qui refusent également l’ordination des femmes et celles, plus libérales, qui ont opté pour l’ouverture.

En ce sens, l’Église épiscopalienne se trouve au cœur d’un combat culturel large : le christianisme a débouché dans de nombreux contextes sur un moralisme inquiétant dont la priorité ne porte ni sur la défense des droits civils, ni sur la lutte pour l’égalité, ni sur des questions de justice sociale. La démission de Gene Robinson m’attriste ; signale-t-elle la victoire de la droite morale chrétienne ? Après les élections américaines, il est certes légitime de se poser la question.

J'ai assisté dernièrement au culte de consécration du nouvel évêque épiscopalien de l’évêché de l’Utah, Scott Byron Hayashi. Plus de 700 personnes étaient rassemblées à cette occasion ; un moment important tant pour la communauté locale que pour l’Église épiscopalienne nationale. Vingt-cinq évêques se bousculaient sur l’estrade : des femmes, des hommes dans une diversité ethnique étonnante. 

 

La politique de l’Église épiscopalienne
américaine cherche à modifier les mentalités et ouvre des dialogues difficiles entre ses diverses congrégations.

Le service s’est fait en trois langues (anglais, espagnol et ute, la langue de la tribu de l’état) et a commencé par une bénédiction traditionnelle prononcée par un ancien de la tribu Ute, en tenue de cérémonie ! Une célébration remarquable qui se voulait fidèle au credo de l’Église épiscopalienne : qui que vous soyez, vous êtes les bienvenu/es. La liturgie et les hymnes au ton bien protestant n’étaient en rien modifiés ; ils offraient ainsi le support sur lequel d’autres éléments ont pu se greffer.

La démission de Gene Robinson m’attriste doublement : après la consécration du nouvel évêque épiscopalien de l’Utah, je me réjouissais de cette vision d’un christianisme ouvert et attentif à la diversité, même ici, au cœur de cette Amérique profondément républicaine et moralement étouffante.

La vision des églises américaines telle qu’elle est véhiculée en Europe, en privilégie indubitablement le côté évangélique et fondamentaliste. Et pourtant, ce qui m’a émue lors de ce culte de consécration, avait trait au côté unique du tableau mis en scène : il m’est impossible d’imaginer quelque part en Suisse, ni d’ailleurs dans la plupart des autres pays européens, une cérémonie qui célébrerait de manière si visible et si accueillante la richesse de sa diversité. 

La politique de l’Église épiscopalienne américaine cherche à modifier les mentalités et ouvre des dialogues difficiles entre ses diverses congrégations. L’évêque nationale, Katharine Jefferts Schori, lutte dans le monde entier pour un christianisme qui sache vivre l’exigence du semper reformanda. Quel est l’organisme ecclésial suisse qui puisse jouer ce rôle ? La diversité religieuse américaine produit une saine compétition au sein des discours théologiques et régule ainsi, en partie du moins, les extrêmes.

Dans le modèle d’une Église étatisée, quelle est la voix ayant le pouvoir d’interroger les pratiques et les discours ecclésiaux ? La droite morale, chrétienne ou non, grandit en Suisse aussi ; l’Église a-t-elle nourri cette droite morale ou va-t-elle en fin de comptes lui résister ? 

 

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Lire la chronique précédente de Muriel Schmid, publiée sur le site de ProtestInfo :
9/11 - Tensions entre libertés d'expression et religieuse

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