De Vinci, Dieu et son «personnel au sol»

Collage autour de «L'homme de Vitruve» (1492) / Pixabay
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Collage autour de «L'homme de Vitruve» (1492)
Pixabay

De Vinci, Dieu et son «personnel au sol»

EPD
30 avril 2019
A l’occasion des 500 ans de la mort du peintre, son biographe rappelle combien Léonard de Vinci était finalement un homme plus religieux que ce fameux «esprit libre» que l’on se représente. Explications.

Léonard de Vinci (1452-1519) n'était pas un «esprit libre», selon son biographe Klaus-Rüdiger Mai, mais «un religieux avec l'immensité de la Renaissance». Si seulement quelques-unes de ses manifestations religieuses lui ont survécu, l'artiste, chercheur et inventeur avait bien compris le monde de son temps comme la création de Dieu, affirme l’auteur de «Leonardo's Secret», publié ce printemps par l'Evangelische Verlagsanstalt (Leipzig), à l'occasion du 500e anniversaire de la mort du peintre.

Cependant, Léonard de Vinci avait vu l'Église comme une institution séculière avec scepticisme et s'était moqué des erreurs du «personnel au sol».

Déchiffrer le «Livre de la Création»

«Ce qui a poussé Léonard de Vinci, c'est la curiosité, la passion de découvrir ce qui unit le monde en son centre, comment la création de Dieu a été conçue», poursuit cet expert de la Renaissance. «Il voulait déchiffrer le "Livre de la Création".» Le fait que Léonard de Vinci ait travaillé comme peintre, mais aussi comme naturaliste et constructeur, n'était pas une transgression des frontières, comme on pourrait le penser aujourd'hui. Les frontières entre la peinture, l'architecture et la technologie étaient plutôt floues à l'époque.

La pensée de Léonard de Vinci a été déterminée par l'hypothèse de base que la nature renvoyait l’image de l’harmonie divine. Il voulait l'interpréter correctement, par exemple dans la recherche de la forme humaine parfaite, qu'il a inscrite dans «L'homme de Vitruve» (1492). Il s'agit du dessin d'un homme aux bras et aux jambes écartés, dont les doigts et les orteils touchent un cercle et un carré.

Le secret de la Joconde

Le peintre, qui menait une vie ouvertement homosexuelle, s'intéressait particulièrement à l'androgynie, la bisexualité ou l'intersexualité. «L'image idéale de l'homme est androgyne, ni femme, ni homme, ni masculin, ni féminin, il flotte», explique encore l’expert. Il voit une racine de la pensée de Léonard de Vinci dans «Le Banquet» de Platon, dans l'histoire de l’humain idéal constitué de deux parties, puis divisé en homme et femme, qui s'attirent dès lors spontanément et mutuellement. L’origine de l’amour selon le philosophe antique.

De plus, dans la théologie de la Renaissance, Dieu est compris comme l'homme et la femme en même temps et en même temps comme l'incarnation de la plus haute perfection, enchaîne le biographe. Le secret très apprécié de la «Joconde» (1503-1506) remonte au fait que Léonard de Vinci a commencé cette peinture comme un portrait de Lisa del Giocondo, qu’il «peignit ensuite, couche par couche, de plus en plus androgyne».

Vols d’oiseaux et dissection de cadavres

«Léonard de Vinci peint lui-même le monde. La peinture est pour lui une façon de reconnaître le monde»,  formule Klaus-Rüdiger Mai. Pourtant, sa vision du monde n'est pas moderne, mais s'inscrit dans la «pensée analogue» de son temps. Ainsi, au Moyen-Âge, toutes les choses de la nature sont considérées comme les correspondances d'un seul créateur. Dans cette conviction spirituelle, Léonard de Vinci avait commencé à mener des recherches très concrètes, telles que l'observation du vol des oiseaux, l'examen des tourbillons d'eau ou encore la dissection des cadavres ainsi que leur documentation. C'est ce qu'il y a de moderne chez lui. EPD / Protestinter