Lire et écrire: la pédagogie protestante

"Le maître d'école", gravure d'Abraham Bosse ~1638 / ©CC0, Wikimedia Commons
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"Le maître d'école", gravure d'Abraham Bosse ~1638
©CC0, Wikimedia Commons

Lire et écrire: la pédagogie protestante

Savoirs
Dès le XVIe siècle, la Réforme met l’instruction au cœur du dispositif de la foi. Pour Luther, il s’agit «de n’épargner ni le zèle ni les frais» pour que tous les enfants fréquentent l’école: «car cela signifie à coup sûr qu’on les amène à Christ».

De même, dès le passage de Genève à la Réforme, la ville rend l’instruction publique obligatoire. Car les réformateurs en sont convaincus: tout le monde doit pouvoir lire la Bible! Le maître d’école devient ainsi une figure essentielle de cette culture religieuse. Et c’est un succès: en France, au XVIIe siècle, l’alphabétisation est plus importante dans la population protestante que chez les catholiques.

Apprendre à interpréter

L’éducation à la lecture est certes liée à l’insistance des réformateurs sur l’Ecriture comme seule norme de la foi. Mais elle représente aussi «une explosion du droit d’interpréter, pour permettre à la communauté de supporter davantage de désaccords», pointe le théologien réformé Olivier Abel.

Si les protestants sont donc «un peuple de lecteurs», appuie ce professeur d’éthique, ils sont «parfois un peu myopes, et prennent souvent le monde du texte autant au sérieux que le monde physique»… Pourtant, cette tradition a aussi produit de riches fruits de culture, même hors du monde ecclésial. Pensons au nombre d’écrivains fils de pasteurs: Friedrich Dürrenmatt, Etienne Bariller, Daniel de Roulet, pour n’en citer que trois.

Apprendre à lire et à écrire: un héritage dépassé à l’heure de la communication visuelle et numérique? Bien plutôt une tradition à réinventer, pour que «l’intellectuel protestant» garde son rôle de «charnière» – préconise Olivier Abel – et que «ce travail de la pensée et de l’imagination soit toujours au foyer de la communauté humaine».