Élise Cairus: Dieu se manifeste par des petits signes de luminosité

Elise Cairus / © Alain Grosclaude
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Elise Cairus
© Alain Grosclaude

Élise Cairus: Dieu se manifeste par des petits signes de luminosité

23 septembre 2019
Portrait
La Genevoise aspire à fonder une aumônerie oecuménique destinée aux personnes traversant des moments difficiles liés à une naissance. Une problématique qui prend l’Église au dépourvu.

Elle vit dans la Maison Mallet, construite sur l’emplacement de l’ancien cloître de Saint-Pierre dans lequel la Réforme a été plébiscitée en 1536. Son appartement donne même sur la cathédrale Saint-Pierre, où Jean Calvin a lu et expliqué les Écritures durant 23 ans. Rien d’étonnant, donc, à ce qu’Élise Cairus ait longtemps envisagé de devenir pasteure. Avant de renoncer, sans s’éloigner pour autant de l’Église protestante de Genève.

La jeune femme projette de travailler au sein de l’Église autour de l’accompagnement spirituel des naissances difficiles. Peut-être en fondant un ministère spécialisé sur ce thème qu’elle a choisi pour sa thèse en théologie. La version grand public de cette enquête, issue d’entretiens avec des personnes touchées par l’infertilité, l’accueil d’un enfant malade ou handicapé, l’interruption volontaire ou médicale de grossesse, ou encore le deuil périnatal vient de paraître aux éditions Salvator (voir encadré).

Des pasteurs dépourvus

Son intérêt pour cette thématique découle de la naissance de sa fille Pauline, en 2010: « J’ai fait une grosse complication après mon accouchement. Dans un autre pays, cela se serait vraisemblablement terminé de manière tragique. Les pasteurs à qui j’en ai parlé, très compétents dans leur ministère, se sont trouvés complètement dépourvus. Ils sont mal préparés à accompagner les problématiques autour de la naissance. »

«Une naissance est l’occasion de s’ouvrir à une certaine spiritualité»

Par son livre puis, espère-t-elle, grâce au ministère «pionnier» qu’elle aspire à fonder, elle souhaite notamment permettre aux pasteurs d’être «outillés pour répondre à ces questions qui rejoignent l’intime. C’est pour cela que c’est d’autant plus compliqué à accompagner. Il est important de savoir recevoir ces personnes en souffrance, de leur offrir un accueil inconditionnel et une écoute bienveillante. Ainsi, elles pourront recommencer à se sentir reliées à Dieu, à une transcendance et être en paix avec elles-mêmes».

S’il existe des lieux destinés à la catéchèse et pour des consultations conjugales, rien n’est prévu pour les personnes traversant des complications liées à la naissance. Élise Cairus évoque l’équivalent d’une aumônerie œcuménique au sens large, qui s’adresserait à toute personne se posant des questions existentielles: «Avec ma pendante catholique, nous n’aurions pas cette connotation pastorale qui peut rebuter certains. Nous sommes des femmes, avec des compétences théologiques qui peuvent faire la différence. Des personnes ont notamment besoin de ritualiser certaines choses, de se remettre à Dieu pour pouvoir aller de l’avant.»

Un enfant, un don de Dieu

Pour Élise Cairus, vivre une grossesse, puis une naissance, est aussi une occasion rare de se poser des questions spirituelles et existentielles sur ses origines et sur l’accueil d’un autre: « ’aime dire que l’on se voit confier un enfant pour un temps. Une naissance est l’occasion de s’ouvrir à une certaine spiritualité, d’accueillir cet autre que soi comme un don de Dieu puisque je présuppose que notre origine est en Dieu, ce qui est écrit dans la Bible. On se demande toujours où l’on va après la mort, mais jamais d’où l’on vient avant la naissance. Pour les chrétiens, c’est du même endroit.»

Bien qu’elle ait baigné dans la foi depuis toujours, la théologienne a connu des moments de doute, notamment au décès de sa maman: «Les deuils peuvent bousculer. Mais cela a, quelque part, renforcé ma foi par la suite, grâce à d’autres expériences, des personnes que j’ai fréquentées et des lectures qui m’ont remise vers l’essentiel. Si je n’avais pas vécu tout cela, je serais peut-être encore dans une foi un peu superficielle, une foi d’enfant. Le décès de ma maman m’a permis de faire une vraie rencontre avec Dieu, par certaines nouvelles personnes côtoyées et à travers des textes spirituels, des auteurs et bien sûr la Bible, inépuisable source d’inspiration et de rencontres de ce Dieu qui nous aime.» Pour elle, il est d’autant plus nécessaire, dans ces moments difficiles, d’observer les petits signes quotidiens de Sa présence, de profiter des moments passés avec les autres et de se ressourcer dans la nature, en se disant que c’est Sa Création. «Ces petits éclats d’éternité, ces petits signes de luminosité font que cela est moins pénible. Il y a toujours eu, à ces moments clés, des gens qui sont apparus dans ma vie et qui ont fait que c’était moins dur à porter. J’avais l’impression d’être accompagnée et que ces personnes avaient été mises auprès de moi de manière bienveillante», précise Élise Cairus.

Bio express

1978 Naissance à Genève.

2003 Mariage avec Olivier, qu’elle a connu dans le choeur des Petits Chanteurs de la cathédrale Saint-Pierre.

2005 Licence en lettres.

2010 Naissance de sa fille Pauline.

2011 Master en théologie; début de l’assistanat en théologie pratique à l’université de Neuchâtel et de sa thèse, qu’elle soutiendra en 2017. Décès de sa maman.

2016 Parution de L’humour des Évangiles dans lequel elle se penche sur quinze passages des Évangiles pour y détecter des traces d’humour.

2019 Parution de L’accompagnement spirituel des naissances difficiles, version grand public de sa thèse.

Côté lecture

Dans son dernier ouvrage, Élise Cairus aborde le délicat problème des naissances difficiles de manière spirituelle et existentielle, avec le témoignage de personnes touchées par l’infertilité, l’accueil d’un enfant malade ou handicapé, l’interruption volontaire ou médicale de grossesse, la fausse couche et le deuil périnatal.