Sommet mondial sur la société d’information à Tunis : Mise en lumière des dysfonctionnements du droit à l’information

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Sommet mondial sur la société d’information à Tunis : Mise en lumière des dysfonctionnements du droit à l’information

10 novembre 2005
La Tunisie bafoue les droits de l’homme en bridant l’accès à l’information
Pourtant, Tunis abritera le prochain sommet sur la société d’information. Si les chances de succès de cette rencontre paraissent aléatoires, le sommet citoyen qui se tiendra en parallèle, libre de toute tutelle, permettra peut-être de faire avancer la cause en abordant les vrais enjeux. L’appui du gouvernement suisse est sollicité notamment par Pain pour le Prochain pour que l’événement ne se résume pas à une énumération de vœux pie.Le fait que la capitale tunisienne ait été retenue pour abriter le sommet mondial sur la société d’information (SMSI) le 16 novembre prochain a quelque chose de choquant. « Le pays hôte est connu pour sa gestion musclée de l’espace public et Internet y est sévèrement contrôlé» rapporte Yves Steiner d’Amnesty International. Les sites prétendûment malveillants sont bloqués, le courriel est épluché : la navigation sur la toile est un exercice périlleux, la cyberpolice veille. Actuellement, des jeunes de Zarzis, au sud du pays, sont emprisonnés pour avoir surfé. Cependant, il est toute une catégorie de la population qui souffre de ces privations et se voit entravée dans sa tâche. Les magistrats, les journalistes, les intellectuels, les associations sont de ceux-là. Récemment, huit personnalités politiques tunisiennes, dont le président du syndicat des journalistes, ont entamé une grève de la faim pour dénoncer le verrouillage de l’espace public. Cette grève a connu un certain impact, jetant le discrédit sur le pouvoir de Ben Ali.

Que vient faire le SMIS dans ce contexte ? Guillaume Chenevière, du Conseil Mondial de la Radio-Télévision : « Le sommet est important à l’intérieur comme à l’extérieur. Il n’y a pas deux sujets qui se contredisent, au contraire ils vont de pair. Il faut faire en sorte que les enjeux de la globalisation soient aussi une chance de globalisation de la dignité humaine».

Le représentant suisse des médias audiovisuels inscrit trois défis au sommaire de la rencontre de Tunis : combler le fossé numérique, mettre les technologies de l’information et de la communication au service de tous et enfin, obtenir de la Tunisie qu’elle se conforme aux principes de la Société de l’Information approuvés à Genève lors de la première rencontre il y a deux ans, déclaration acceptée par tous les gouvernements, y compris la Tunisie.

L’ambition de déboucher sur un compromis est grande, Guillaume Chenevière doute qu’on y parvienne. « L’hypothèse que le SMIS accouche d’une solution d’avenir pour la gouvernance de l’Internet est bien incertaine, tant les délégation officielles ont tardé à affronter la complexité du dossier ». Les Etats-Unis, soutenus par les géants de l’informatique tels Google, Microsoft ou IBM, entendent maintenir le statu quo tandis que l’ensemble de tous les autres pays, y compris ceux de l’Union Européenne, demandent un contrôle multilatéral avec tous les acteurs industriels, civils et autres.

Si le sommet n’accouche que d’une souris, un point positif subsistera : les entraves au droit à l’information auront été portées devant l’opinion publique, évitant ainsi que le sommet ne se déroule dans l’indifférence générale." Participer au sommet, c'est cautionner une politique liberticide"Pour sa part, le conseiller national socialiste Carlo Sommaruga, auteur d’une intervention parlementaire au sujet du SMIS, pense que « participer au prochain Sommet, c’est cautionner la politique liberticide du régime de Tunis et mépriser les militants des doits humains de ce pays».

Son interpellation visait à obtenir une position claire du Conseil fédéral avant que le sommet ne commence. A ce jour, son intervention demeure lettre morte. Pour lui la Suisse a un rôle à jouer en offrant un fort soutien à la défense des Droits de l’homme.

Parallèlement au sommet officiel de Tunis, un sommet citoyen sera mis sur pied. Pour l’heure, l’endroit n’est pas connu pour des raisons de sécurité, tous les hôtels contactés ont refusé de louer leurs salles sur injonction des autorités et aucun espace n’est disponible. Cependant, il aura bel et bien lieu.

Ce sommet alternatif devrait permettre d’aborder librement les problèmes dans leur réelle dimension. Les gouvernements démocratiques sont invités à y participer, la Suisse en premier lieu. Des contacts ont été pris avec des personnalités politiques, des représentants devraient faire le déplacement à Tunis.