Le christianisme et l'islam face à la démocratie
19 mars 2004
Théologien et politologue, Jacques Rollet tente d’expliciter la relation complexe de la Religion et la politique
Cette remarquable étude, parue en octobre 2001, vient de sortir en livre de poche. L’occasion de suivre l’auteur dans l’histoire mouvementée des liens entre spirituel et temporel. Traiter du thème du rapport entre le religieux et le politique, dans le cadre des démocraties occidentales, c’est pour Jacques Rollet « évoquer le rapport du christianisme et de l’islam à la modernité ». La philosophie des Lumières et les révolutions politiques de la fin du XVIIIe siècle vont profondément chahuter le champ religieux, au point de susciter le refus du monde moderne et du libéralisme démocratique par la papauté au XIXe siècle. Pourtant, note le politologue, « le christianisme n’est pas étranger à l’idée de la personne humaine comme libre et responsable, et empêche les tenants les plus radicaux de la raison laïque de monopoliser à leur profit la rationalité et la liberté ». Laïcité et sécularisationDepuis l’Antiquité et au Moyen-Age, explique Jacques Rollet, christianisme et islam ont exploré leur rapport au politique. En ce qui concerne le premier, dès le XVIe siècle, des philosophes chrétiens ont « fondé le pouvoir sur un contrat, raisonnant à partir de l’individu ». Des théories qui deviendront des faits avec la Déclaration d’Indépendance américaine (1776) et celle des Droits de l’Homme (1789) en France. Si toutes deux recèlent des visées et certains présupposés communs, elles diffèrent totalement dans leur rapport au religieux. « Les Américains articulent harmonieusement démocratie et christianisme ». De leurs côtés, les révolutionnaires, bien décidés à changer la société, « font de la laïcité une arme contre les Eglises, particulièrement l’Eglise catholique, ce qui entraîne jusqu’au début du XXe siècle une réaction de rejet de la part de la papauté ».
On le sait, l’islam n’a pas connu cet élan vers la modernité. Dieu n’y a pas délégué son autorité, et l’umma des croyants demeure une communauté sociale, politique, militaire et religieuse. « On n’y retrouve ni la dynamique de laïcité, ni la rivalité positive entre l’organisation cléricale et le pouvoir monarchique, caractéristique de l’histoire occidentale ». La cité de Dieu musulmane s’inscrit en faux contre la vision occidentale du progrès conduisant à une cité conforme à la raison. Seul compte l’idéal de « restauration », fidélité à l’islam des origines, avec une liberté individuelle disparaissant au profit de l’égalité communautaire, et l’absence de toute idée d’un Etat - nation, puisque seul compte « la nation arabe au sens d’islamique ».
L’auteur s’arrête enfin sur la question de la sécularisation, caractéristique majeure de notre modernité, « affirmation de la consistance et de l’autonomie de l’ordre profane par rapport à la sphère religieuse ». Une autonomie de l’homme, qui se distancie de toute tradition pour se penser par lui-même, selon les termes de Luc Ferry, que le christianisme, « religion de la sortie de la religion », a largement provoquée. L’Ancien Testament, déjà, montre un peuple qui reconnaît son Dieu dans le cadre d’un processus de libération socio-politique explicité par l’Exode : « L’approche que les premiers Israélites ont faite de Dieu est absolument originale. Ils ne l’ont pas découvert à partir de la nature, d’une spéculation philosophique ou de tel élément considéré comme sacré, mais c’est Dieu lui-même qui s’est fait connaître, au cœur de leur histoire, comme une personne transcendante qui appelle à la liberté ». Avec la venue de Jésus, Dieu se fait homme et la vie humaine elle-même devient « le lieu d’une réponse libre au Père. Pour tous les hommes, a liberté est le lieu de la foi ». UTILE
Jacques Rollet, Religion et politique, Livre de Poche, 2004
On le sait, l’islam n’a pas connu cet élan vers la modernité. Dieu n’y a pas délégué son autorité, et l’umma des croyants demeure une communauté sociale, politique, militaire et religieuse. « On n’y retrouve ni la dynamique de laïcité, ni la rivalité positive entre l’organisation cléricale et le pouvoir monarchique, caractéristique de l’histoire occidentale ». La cité de Dieu musulmane s’inscrit en faux contre la vision occidentale du progrès conduisant à une cité conforme à la raison. Seul compte l’idéal de « restauration », fidélité à l’islam des origines, avec une liberté individuelle disparaissant au profit de l’égalité communautaire, et l’absence de toute idée d’un Etat - nation, puisque seul compte « la nation arabe au sens d’islamique ».
L’auteur s’arrête enfin sur la question de la sécularisation, caractéristique majeure de notre modernité, « affirmation de la consistance et de l’autonomie de l’ordre profane par rapport à la sphère religieuse ». Une autonomie de l’homme, qui se distancie de toute tradition pour se penser par lui-même, selon les termes de Luc Ferry, que le christianisme, « religion de la sortie de la religion », a largement provoquée. L’Ancien Testament, déjà, montre un peuple qui reconnaît son Dieu dans le cadre d’un processus de libération socio-politique explicité par l’Exode : « L’approche que les premiers Israélites ont faite de Dieu est absolument originale. Ils ne l’ont pas découvert à partir de la nature, d’une spéculation philosophique ou de tel élément considéré comme sacré, mais c’est Dieu lui-même qui s’est fait connaître, au cœur de leur histoire, comme une personne transcendante qui appelle à la liberté ». Avec la venue de Jésus, Dieu se fait homme et la vie humaine elle-même devient « le lieu d’une réponse libre au Père. Pour tous les hommes, a liberté est le lieu de la foi ». UTILE
Jacques Rollet, Religion et politique, Livre de Poche, 2004