L’Eglise protestante formule dix repères éthiques fondamentaux
Le thème des valeurs fondamentales du protestantisme est traité depuis longtemps au sein de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse, cette prise de position n’est donc pas une réponse à Mgr Koch. Par contre, nous devions être davantage conscients des critères qui servent de base à nos prises de position, afin d’éviter qu’elles ne soient prises par opportunisme. Le dialogue sur les valeurs dans la société s’est accru. Les principaux partis gouvernementaux entrent en discussion avec nous à ce sujet et incluent certains de nos éléments de réponse dans leur propre démarche. Qu’il s’agisse du débat sur l’islam, sur l’éducation ou sur les salaires des hauts dirigeants d’entreprises, la société recherche une base de réflexion commune. Nous avons voulu apporter notre contribution à ce débat
Les partis et la Constitution se réfèrent certes aux valeurs fondamentales. Mais leur compréhension de ces valeurs est-elle la même que celle de l’Eglise ?De manière générale, ce n’est pas le cas. La publication de la FEPS s’intéresse à déterminer ces valeurs d’un point de vue chrétien ; il peut ne pas coïncider avec les options choisies par les partis politiques. La liberté est une valeur importante pour la foi chrétienne, mais ne peut être comprise dans le même sens que la liberté d’un libéral, par exemple. En outre, alors que les partis sont tenus de mettre l’accent sur des choix primordiaux, l’Eglise doit souligner la relativité de ces valeurs, qui sont toutes de même rang et participent à un même système.
Vous définissez dix valeurs fondamentales. Comment avez-vous fait ce choix ? Leur nombre est-il invariable?La justice, la liberté, la responsabilité, le développement durable, la communauté, le renforcement des compétences propres de chacun (empowerment), la participation, la solidarité, la paix et la réconciliation sont un choix déterminé par l’Evangile, ainsi que par les valeurs fondamentales déjà élues par la FEPS. Il ne s’agit toutefois pas d’une liste fermée ou fixée pour l’éternité, elles pourraient être au nombre de huit ou douze. Cependant, elles n’ont pas été choisies au hasard ; ces valeurs se sont imposées sur le long terme mais reflètent aussi la réalité contemporaine, comme l’accent mis sur le développement durable.
Entendez-vous donner de ces valeurs une définition univoque, ou chacun peut-il livrer sa propre interprétation ?Il s’agit d’une offre d’orientation de la FEPS, et, selon la pensée protestante, chaque chrétien doit y réfléchir. Il n’y a pas une seule réponse. L’éthique n’est pas un bloc monolithique, mais un discours qui comprend toujours un débat. Cependant chacun n’est pas libre d’interpréter ces valeurs à sa guise, l’interprétation doit découler de l’Evangile. Certaines valeurs forment d’ailleurs une base commune à plusieurs religions : la justice et l’équité représentent une valeur très forte dans l’islam, qui a beaucoup de similarité avec la conception chrétienne ou judaïque. De même, le développement durable est un repère partagé par le bouddhisme ou l’islam. Par ailleurs, il serait faux d’identifier les valeurs occidentales aux valeurs chrétiennes : la communauté, par exemple, est une notion sous-développée dans notre société par rapport à ce qu’elle est dans la société africaine.
A qui s’adressent ces dix valeurs fondamentales ?Aux responsables des paroisses et des Eglises cantonales, à titre d’orientation pour leurs propres prises de décision, aux parlementaires et aux politiques qui souhaitent clarifier les notions de justice ou de solidarité, et à toute personne intéressée. Ces thèses paraissent avec deux autres publications : le livre « Grundwerte » destiné à la communauté scientifique, paru en allemand aux éditions TVZ, et dix modules destinés à la formation continue des adultes, afin d’encourager les cours d’échanges sur ce thème.
« Les Valeurs fondamentales selon la vision protestante », Christoph Stückelberger, Frank Mathwig, 2007, disponible sur le site www.sek.ch