Constitution genevoise : statu quo dans les relations Eglises-Etat

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Constitution genevoise : statu quo dans les relations Eglises-Etat

Anne Buloz
22 février 2011
L’avant-projet de la Constitution genevoise maintient le statu quo dans les relations entre les Eglises et le canton. Le texte rappelle la laïcité du canton de Genève et le fait qu’il ne subventionne aucun culte. Mais il est ajouté que le canton entretient des relations avec les communautés religieuses et reconnaît le travail des associations, dont peuvent faire partie les Eglises.




A Genève, le souhait des Eglises de voir introduite une référence à la dimension spirituelle de l’être humain, comme cela a été le cas dans la Constitution vaudoise en 2003, n'a pas été exaucé. Néanmoins, des valeurs et des droits fondamentaux chers aux Eglises, comme la dignité humaine, l’égalité, le droit à la vie, la liberté personnelle et le droit à l’intégrité y sont largement abordés.

Vers un statu quo

« Nous n’avons pas obtenu d’améliorations fabuleuses au niveau de la reconnaissance des Eglises dans le canton, mais la situation n’a pas non plus été dans le sens d’une péjoration. J’estime qu’il y a un certain équilibre entre la notion de laïcité dans la Constitution et la volonté que chacune des communautés religieuses soit respectée. Introduire l’idée de relations avec les communautés religieuses est déjà une forme de reconnaissance », explique Maurice Gardiol, membre de l’assemblée constituante et ancien modérateur de la Compagnie des pasteurs.

Il fait part de la satisfaction des Eglises sur plusieurs articles : « C’était important pour nous que soient définies des valeurs et des droits fondamentaux des personnes auxquels nous sommes attentifs, comme la liberté de croyance et d’expression, la dignité et l’intégrité des personnes humaines dans des perspectives de solidarité, le droit à la vie et à un environnement sain. Cela permet aux Eglises de s’y retrouver. Obtenir ces droits et ces libertés est un acte citoyen que nous faisons en tant que chrétien. Là aussi, il y a une possibilité d’action ! ».

« L’Eglise doit être une force de résistance »

L’ancien diacre veut même voir comme une chance le fait qu’aucun article consacré aux Eglises ne soit prévu : « Il y a certains avantages pour les Eglises à avoir un statut plus ou moins de droit public, même s’il y a aussi des désavantages. Nous pouvons avoir autant de poids, voir même plus, car nous avons plus d’indépendance. La liberté de parole et d’action doit être utilisée à bon escient. L’Eglise doit être une force de résistance ».

Genève est l’un des trois cantons laïques de Suisse (avec NE et BS), un fait qui n’empêche pas le dialogue entre les autorités et les Eglises. « Nous devons travailler sur la réalité qui est la nôtre. La situation historique des Eglises à Genève est celle d’une séparation, on ne peut pas revenir là-dessus. La reconnaissance doit s’inscrire dans un type de partenariat un peu différent. Pour moi, la dimension spirituelle est bien sûr une contribution importante, mais pas exclusive », reconnaît Maurice Gardiol.

Subventions possibles

Bien que les Eglises ne soient pas citées nommément, elles pourront tout de même recevoir des subventions pour certaines de leurs missions en tant qu’associations. Grâce au nouvel article 193 de l’avant-projet, qui concerne les associations et le bénévolat : « L’Etat reconnaît le rôle des associations et du bénévolat dans la vie collective. Il peut nouer des partenariats pour des activités d’intérêt général ».

Cet article concerne également les Eglises, qui sont donc sur un pied d’égalité avec toutes les autres associations, d’après Maurice Gardiol : « Rien n’empêche que les Eglises puissent faire l’objet d’un soutien financier pour des activités sociales et spirituelles. Je pense en particulier aux aumôneries. L’Etat met déjà des locaux à disposition des communautés religieuses dans certains cas. Nous pourrons négocier pour des projets précis en vertu de l’obligation de droit supérieur des gens de bénéficier d’un soutien spirituel par des représentants des religions ».

Si l’avant-projet ne rend pas la contribution ecclésiastique obligatoire, il a évité un écueil en ne supprimant pas la possibilité pour l’Etat de continuer à encaisser les contributions ecclésiastiques volontaires. Toute mention chrétienne n’a par ailleurs pas été mise de côté dans la nouvelle constitution, puisqu’il est prévu que l’armoirie du canton de Genève y figure, avec le cimier (soleil) portant le trigramme IHS en lettres grecques, abréviation du nom de Jésus.

D’autres cadres comptent aussi

Tout est-il déjà joué ou les Eglises possèdent-elles encore une marge de manœuvre en vue du texte définitif ? « Certaines choses qui figurent dans l’avant-projet ne vont pas forcément y rester si elles n’ont pas de soutien plus global, alors que d’autres peuvent y être ajoutées si la population se prononce en leur faveur. Mais je pense que nous ne pouvons pas aller beaucoup plus loin, car on ne peut pas tout dire dans la constitution. C’est un cadre qui n’empêche pas des avancées à d’autres niveaux législatifs », poursuit Maurice Gardiol.

L’ancien diacre encourage les débats informels : « C’est bien qu’il puisse y en avoir en plus des séances officielles. Les protestants sont bien sûr à disposition pour y participer ». Après la journée itinérante de lancement de la consultation, le 5 février dernier à bord d’un bus à impériale, des représentants de l’Assemblée constituante participeront à cinq soirées dans les communes.

Les Genevois auront ainsi l’occasion de venir échanger avec eux sur les thèmes qui leur tiennent à cœur, parmi lesquels la question des Eglises. Ces dernières y seront représentées par les constituants qui soutiennent leurs idées. Les Genevois peuvent défendre leurs opinions en remplissant le questionnaire de prise de position avant la fin de la période de consultation, le 25 mars.

Questionnaire

  • Le questionnaire de prise de position est disponible sur www.ge.ch/constituante ou par téléphone au 022 546 87 07

    Cet article a servi de base :

    Au "Juste Ciel" sur RSR La Première le 23 février à 06h38.