Les Japonais se tournent vers les traditions pour trouver le réconfort

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Les Japonais se tournent vers les traditions pour trouver le réconfort

17 mars 2011
Washington, le 17 mars (ENInews-RNS-USA Today\Cathy Lynn Grossman) – Alors qu'un nombre incalculable de gens ont perdu la vie suite au séisme et au tsunami qui ont frappé le Japon la semaine dernière, vers quoi les habitants de l'archipel vont-ils se tourner pour retrouver leur force spirituelle? Des experts de la culture japonaise affirment que ce sont les rituels indispensables et réconfortants de la religion qui répondront à leurs besoins.


Ils s'appuieront sur les traditions séculaires d'une culture bouddhiste particulière et sur les très anciennes croyances shintoïstes de leurs aînés, indique le quotidien USA Today par le biais de Religion News Service (RNS). Les Japonais sont 90% bouddhistes ou shintoïstes, ou encore une combinaison des deux. Les populations jeunes et urbaines sont quant à elles davantage susceptibles de s'être détournées de la religion.

Pour le moment, la plupart des survivants en sont à l'étape – comme après les attentats du 11-septembre – où ils affichent des photos de leurs proches dont ils sont sans nouvelles. Pour les familles qui ont retrouvé leurs proches morts, des veillées, des prières funèbres et des crémations ont peut-être déjà lieu, a expliqué Duncan Williams, survivant du tremblement de terre du 11 mars et spécialiste du bouddhisme japonais à l'Université de Berkeley, Californie.

Sept jours après le séisme et le tsunami, des commémorations débuteront dans ce qu'il reste de temples près de la zone sinistrée. Dans les traditions bouddhistes, le rituel du septième jour constitue le point de départ de 33 années de cérémonies officielles de deuil, a indiqué Duncan Williams.

Tout comme les chrétiens et les juifs prient pour les victimes et les personnes en deuil, ces rituels et prières proviendront des quatre coins du Japon, mais aussi de Thaïlande et de Taïwan, où nombreux sont ceux qui suivent la forme japonaise du bouddhisme, a déclaré Duncan Williams, qui est né au Japon.

 

Loin du bouddhisme méditatif de l'Occident

Le bouddhisme s'efforce d'atténuer la souffrance, qu'elle soit d'ordre physique ou psychologique. Il met l'accent sur la compassion tout en reconnaissant que la mort fait partie de la vie. Au Japon, les moines affirmeront aux gens qu'ils n'ont pas survécu en vain, selon Duncan Williams. « Pendant les cérémonies commémoratives, après les prières et les chants, les moines et les gens offriront tout le mérite – le bon karma – qui découle de ces rituels à celles et ceux qui ont péri, ainsi qu'à celles et ceux qui souffrent. » Ils prieront les dieux pour que « les rois de l'enfer n'emportent pas les proches », a déclaré Duncan Williams.

Un tel discours sur les dieux et les rois de l'enfer n'évoque pas le bouddhisme méditatif qu'on connaît en Occident, fait remarquer l'anthropologue des cultures John Nelson. Expert des sanctuaires shintoïstes et bouddhistes, il est également le directeur du département de théologie et d'études religieuses à l'Université de San Francisco.

Pour John Nelson, la culture shintoïste est « comme les religions amérindiennes ou tribales: elle se révèle surtout dans les environnements ruraux. Si l'on est dans les montagnes, on parlera des déités de la montagne, par exemple. Tout se rapporte aux esprits locaux d'un endroit particulier, et ils peuvent avoir une double nature – bénéfique ou destructrice. »

Le bouddhisme, en revanche, qui est aujourd'hui la principale religion du pays, porte moins sur les esprits du monde naturel et plus sur les rituels de la société, de la famille et de l'Etat, a affirmé John Nelson. « Le bouddhisme japonais est semblable aux religions occidentales, avec des déités qu'on peut interpeller et qui peuvent intervenir dans les affaires de ce monde. Il existe de nombreux mécanismes pour faire appel à eux, afin que des miracles se produisent », a-t-il expliqué.

Pourtant, l'idée que les dieux puissent punir les gens a été évoquée le 14 mars dans la presse japonaise. John Nelson a affirmé avoir lu sur le site web de deux grands journaux que le gouverneur de Tokyo a qualifié le tsunami de « châtiment du ciel punissant la cupidité des Japonais ». (666 mots-ENI-11-F-0029-JMP)