La désobéissance civile devrait avoir droit de cité

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La désobéissance civile devrait avoir droit de cité

25 septembre 2020

Quand les circonstances l’exigent, la désobéissance civile devrait avoir droit de cité. Il est normal que des jeunes défendent leur droit à un avenir « vivable ». Analyse personnelle.

La situation telle qu’elle est. Dans les débats sur les manifestations climatiques, une chose ne saurait être oubliée : ces jeunes veulent exister demain dans des conditions « vivables », ils en ont fondamentalement le droit et nous, la société, devrions leur permettre de le faire. Ils ont compris que la perspective d’un avenir satisfaisant est gravement en jeu pour eux, leurs enfants, petits-enfants… Et, bien entendu, il ne s’agit pas seulement de vies humaines mais de celle généralement de la biosphère - y compris des approvisionnements en eau et en nourriture qui ne soient pas au détriment de l’équilibre de l’écosystème.

Un demi-siècle de travaux scientifiques, de conférences et d'actions engagées n’ont pas suffi, il s’en faut de beaucoup, pour poser les bases d’une survie digne sur cette planète. Et la « démocratie-modèle » suisse tant vantée n’y arrive pas suffisamment non plus (bien que la loi CO2 qui vient d’être adoptée est bien sûr un pas dans la bonne direction - il en faudra d’autres, sans trop attendre).

La désobéissance civile. Des échanges avec collègues et amis m’ont fait réfléchir de manière de plus en plus vive à cette question. Mon histoire personnelle ne m‘y a guère préparé (je m’en suis ouvert dans une inclusion « Climat » dans ce blog le 10 septembre dernier). J’ai aussi appris dans ma carrière de santé publique que, peut-on dire, « noir et blanc n’existent pas » dans la vie. Qu’il faut savoir comprendre l’autre, négocier, accepter les politiques des petits pas dont nous sommes de grands experts. De plus, j’ai longtemps servi un Etat cantonal et ai appliqué ses lois. Pourtant, les défis actuels m’ont fait m’associer à plusieurs reprises à des militants tellement plus jeunes que moi. Ce que nous vivons en termes de dérèglement climatique et de chute de la biodiversité justifie à mon sens d’aller dans des directions marquant la différence, l’opposition.

Exemplarité. Certains amis assumant des fonctions élevées me font fait part de leur malaise de voir des médecins-cadres s’afficher avec Extinction Rébellion (XR) par exemple. Acceptable, y compris s’ils sont payés par l’Etat ?  Je crois pour ma part que des personnes auxquelles on peut accoler le terme d’élite (même s’il n’est plus guère à la mode…), le corps médical entre autres, devraient avoir un rôle, un mandat, d’exemplarité ? En ce qui concerne l’enjeu climatique, il y a certainement aujourd’hui une place pour l’exemplarité, y compris désobéissante.

Etat de nécessité. Selon un principe majeur de vie en commun, la question de la proportionnalité est, ici aussi, fondamentale. Il faut que l’on soit dans une situation qui autorise de dire « Nécessité fait loi » ou dans le cadre de ce que le Code pénal appelle état de nécessité.  Le jugement de Renens du 13 janvier dernier acquittant les tennismen/women du Credit suisse de Lausanne est allé dans ce sens et a eu un retentissement historique, loin dans le monde. ll vient d’être renversé en appel, je le regrette vivement. Je ne suis pas juriste, mais on peut penser qu’un juridisme étroit a prévalu sur l’appréciation adéquate d’évolutions graves majeures et qui ne permettent pas de tergiverser.

Zone de confort. Les dérèglements naturels actuels nous gênent, bousculent nos manières de faire. On aimerait pouvoir penser que le défi climatique n’est pas la première situation grave que l’humanité affronte, que « cela a toujours été jusqu’ici, cela ira bien encore cette fois ». C’est probablement ce qui explique cette attitude indéfendable, trop fréquemment servie, qui consiste à penser que les faits établis depuis plusieurs décennies, admis par plus des 97% de la communauté scientifique, ne valent pas mieux que les convictions ou intuitions personnelles de chacun (la politique au Café du Commerce…).

Urgence. ll y a urgence, mais force est de constater qu’il y a pour le public urgence et urgence. D’un côté celle de l’ambulance, tout le monde respecte et applaudit. De l’autre les urgences peu visibles ou invisibles - c’est encore le cas du climat. S’agissant de ces dernières, les puissants, politiques et autres décideurs, préfèrent jusqu’ici regarder ailleurs. Puissants que, de manière courageuse et à plusieurs reprises, le Secrétaire général des Nations Unies a mis en garde récemment autant que le permettent les usages diplomatiques.  

Qui devait être sanctionné ? Les jeunes militants pro-climat ont créé quelques perturbations c’est vrai, mais notre société marche sur la tête quand on les traite de terroristes. En réalité, s’agissant des enjeux planétaires, les milieux qui comptent, dont la finance, portent une très grande responsabilité dans des bouleversements bien plus graves. Se demander alors qui devrait être interpelé et même sanctionné, comment et combien ? Bonne question.

So what/Alors ? Je crois que nous sommes aujourd’hui dans une situation où à plusieurs égards nécessité fait loi. Je salue l’engagement de celles et ceux qui, dans notre pays sérieux et discipliné, se déterminent à déranger et parfois bloquer, contrevenir au cadre légal, pour nous sensibiliser à la situation. Je vois que, à l’inverse, certains d’entre nous ne veulent en aucun cas de la désobéissance civile. Mais peut-être pourrait-on rappeler, comme un exemple où la Suisse officielle n’a pas été optimale, pour le moins, ce qu’on fait des « Justes » il y a quatre-vingt ans.

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