Saint Augustin: confesser un désir sans repos

Saint Augustin dans son cabinet de travail, tableau d'Antonio Cifrondi (~ 1707-1710) / ©Public domain, via Wikimedia Commons
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Saint Augustin dans son cabinet de travail, tableau d'Antonio Cifrondi (~ 1707-1710)
©Public domain, via Wikimedia Commons

Saint Augustin: confesser un désir sans repos

Aspiration
Dieu est présent dans nos vies, même lorsque nous ne le reconnaissons pas. Découverte, cette certitude apaise les tourments et pousse à s’avancer vers lui de manière toujours renouvelée.
Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre coeur est sans repos tant qu’il ne repose en toi… Tu as appelé, tu as resplendi, tu as embaumé, j’ai respiré et – haletant – j’aspire à toi. J’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif: tu m’as touché, et je me suis enflammé pour ta paix.
Saint Augustin, extrait des Confessions, livres I et X (IVe-Ve siècles)

Une confession, cela peut avoir deux sens. Ce peut être l’aveu de péchés – c’est le sens le plus courant, le plus immédiat –, mais aussi l’affirmation d’une certitude de foi: c’est ainsi que le credo que l’on récite dans la liturgie s’appelle une «confession de foi». Si saint Augustin, au tournant du IVe au Ve siècle, commence l’ouvrage qu’il intitule Les Confessions par la reconnaissance que son «coeur est sans repos tant qu’il ne repose en Dieu», cela signifie que cette autobiographie n’est pas tant un récit pénitentiel qu’une ode à la présence de Dieu dans sa vie. Une présence dont il cherche toujours davantage à s’imprégner pour entrer dans la paix qu’elle offre.

Car, oui, malgré les moments traversés dans notre existence, qui nous font parfois honte, nous pouvons reconnaître – dans la foi – que la lumière de Dieu est plus forte que ces zones d’ombre: sa grâce transfigure ces moments ressentis comme négatifs en étapes de croissance. En effet, Dieu était bien présent en nous, même dans les passages que nous préférerions ne pas avoir franchis.

Une telle lecture, que fait saint Augustin de sa propre vie, permet alors de quitter un moralisme étroit, qui pousserait à dénigrer le passé, pour discerner au contraire dans ce qui a été vécu un parcours qui nous a construits. Plus: un chemin accompagné, guidé par un Autre dont on découvre, parfois très subitement, qu’il nous a «faits pour lui», qu’il «était là et je ne le savais pas», selon la confession du père de l’Eglise.

Cette prise de conscience ouvre à la louange. Mais elle éveille aussi au désir: celui de se laisser habiter de plus en plus par cette lumière apaisante. Une aspiration qui passe notamment par les cinq sens, car Dieu ne se manifeste pas à nous de manière purement intellectuelle. Si son appel est une lumière qui resplendit, il est encore un parfum qui embaume, une caresse qui nous touche, reconnaît Augustin. L’élan pour y répondre colore alors d’un sens nouveau toutes les réalités de notre quotidien, et en particulier chacune de nos relations. Cette aspiration se vit à travers l’ensemble de notre personne.

En effet, créée à l’image et à la ressemblance de Dieu, la personne humaine n’est pas encore accomplie. Pour entrer dans une plénitude, affirme saint Augustin, elle doit toujours à nouveau s’orienter vers Dieu, en qui elle trouve son repos. L’amour est ce mouvement qui entraîne la personne vers elle-même, vers les autres et vers Dieu.

On découvre alors que le désir, qui fait de nous des humains, n’est pas un mal, mais au contraire un élan, une ouverture, une espérance. Et là apparaît crédible ce qu’Augustin écrit ailleurs: «Maintenant notre vie est espérance, puis elle sera éternité.» 

Conversion

Augustin est né à Thagaste (dans l’Algérie actuelle) en 354. Après une jeunesse dont il dit qu’elle a été dissolue, il se convertit au christianisme sous l’influence de l’évêque Ambroise de Milan, de qui il reçoit le baptême en 387. Dès ce moment, Augustin quitte son occupation de professeur de rhétorique pour embrasser la vie monastique. En 395, il est acclamé évêque d’Hippone, sa ville. Il le restera jusqu’à sa mort en 430. Saint Augustin est sans conteste le père de l’Eglise dont la pensée a eu l’influence la plus considérable dans le christianisme d’Occident, notamment sur le réformateur Luther.