La Librairie du Cep veut travailler la vigne du Seigneur

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La Librairie du Cep veut travailler la vigne du Seigneur

13 mai 2004
A Lausanne, réformés et catholiques ont fermé leurs dernières enseignes
Il reste pourtant trois librairies chrétiennes dans le canton de Vaud, toutes de sensibilité évangélique. Eclairage sur celle qui tient pignon sur rue en plein centre-ville depuis plus d’un quart de siècle. Avec la défunte Librairie de l’Ale disparaissait la dernière officine réformée vaudoise. Ce qui ne signifie nullement que le canton n’abrite plus de magasin « chrétien ». Terme flou, qu’il faut décoder pour comprendre que si les survivants sont bien protestants, ils appartiennent à la mouvance évangélique. A Vevey, se trouve toujours La Clé de sol, vieille enseigne également importatrice de musique et organisatrice de concerts. A Nyon, Carrefour tient également bon malgré un marché du livre en crise.

Enfin, à Lausanne, Le Cep occupe deux grandes vitrines en plein centre-ville, à la rue de la Madeleine. Et ça ne date pas d’hier puisque l’enseigne a fêté il y a deux ans un quart de siècle d’existence. Les disparitions successives dans le chef lieu vaudois de l’Ale et de la Nef catholique, ainsi qu’à Genève du Point de Repère, ont mis en lumière une dure réalité économique : « Etant donné un trop faible débit et des prix volontairement bas de la part des éditeurs, notamment pour les bibles, notre type de commerce ne peut qu’être déficitaire en Suisse romande, et ne survivre que grâce à des soutiens extérieurs », souligne le gérant du Cep, Jean-Paul Blairy. Chaque année, une fondation éponge ainsi entre 50 et 60'000 francs pour parvenir à un fragile équilibre financier, « atteint uniquement par un strict contrôle des charges et l’aide d’une vingtaine de bénévoles fidèles ».Comité de lectureLa singularité du Cep, qui intrigue souvent et dérange parfois, consiste à n’avoir en rayon que ce qui aura été préalablement validé par un comité de lecture. C’est-à-dire de censure ? « Nous nous sentons partie prenante dans ce que nous vendons, et certaines choses n’entrent tout simplement pas dans notre théologie, donc nous ne le présentons pas. En revanche, si un client nous le demande, nous le commanderons ». C’est ce que l’on appelle ici les « livres en vente restreinte », qui ne représentent selon le gérant « qu’un très faible pourcentage des titres reçus ».

Exemple qui lui vient immédiatement à l’esprit : « L’Evangile oublié » de Frédéric Amsler. Le théologien genevois y développe la fameuse thèse de la « source Q », nom donné par les exégètes à une transcription disparue des paroles de Jésus qui aurait servi de référence aux auteurs des trois Evangiles synoptiques. « Une théorie clairement incompatible avec notre rapport aux Ecritures », reconnaît Jean-Paul Blairy. Cette volonté d’écarter les ouvrages trop éloignés de la théologie évangélique rappelle que Le Cep est autrefois né d’une volonté et d’une financement issus des rangs darbystes. « Pendant longtemps, tous les membres de la fondation en étaient issus, admet Jean-Paul Blairy. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Par ailleurs, depuis mon arrivée, je crois avoir ouvert notre stock, notamment à la diversité évangélique qui est parfois importante. En matière de bibles, dont nous vendons quelque 1'600 exemplaires annuels, nous possédons la grande majorité des versions et traductions, y compris orthodoxe ou œcuménique. Mais c’est vrai que nous ne pouvons, pour des questions de place, ni ne voulons tout avoir en magasin. Dans ce cas, nous renvoyons tout simplement les gens pressés à Payot ».

Cela n’arrive pas très souvent puisque les trois quarts de la clientèle est issue des Assemblées évangéliques de Suisse romande (AESR), le reste appartenant le plus souvent aux diverses tendances évangéliques. Cette situation évoluera-t-elle maintenant que le Cep reste le seul magasin confessionnel de la place ?« Nous voyons déjà des visages inconnus depuis quelques semaines, se réjouit Jean-Paul Blairy, qui rappelle que la finalité du Cep est de répandre la Bonne Nouvelle sous toutes ses formes. « Lorsqu’un jeune achète un CD de louange, ce but est tout aussi atteint qu’avec la vente d’un Nouveau Testament ».