Cours public à l'Université de Lausanne:L'énigme de Moïse, figure commune aux trois religions

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Cours public à l'Université de Lausanne:L'énigme de Moïse, figure commune aux trois religions

2 décembre 2004
Moïse a-t-il inventé le monothéisme et peut-il contribuer au dialogue interreligieux aujourd’hui ? Sans lui, il n’y aurait ni judaïsme, ni christianisme, ni précurseur de Mahomet
Thomas Römer, professeur de l’Ancien Testament à l’Université de Lausanne, inaugure aujourd’hui 2 décembre un cours public proposant une approche par le texte et l’image de la figure biblique qui a traversé les trois religions. Une façon de se réapproprier un héritage culturel commun.

Thomas Römer, professeur de théologie, et Bernadette Neipp, priva docent de la Faculté de théologie de Lausanne, proposent depuis ce soir une double approche de Moïse, mettant en dialogue ce que disent les textes de la bible hébraïque et les représentations peintes ou sculptées qu’en ont données les artistes au fil du temps. Le cours, ouvert à tous, a pour but de chercher à percer l’énigme de la figure de Moïse, à étudier son évolution au gré des interprétations, à voir comment les enquêtes sur le texte et l’iconographie s’enrichissent mutuellement au fil du temps.

Seul personnage de toute l’histoire biblique à avoir vu Dieu en face à face, Moïse est sans doute l’homme le plus important de la Bible hébraïque. Sans lui, il n’y aurait ni judaïsme, ni christianisme. Pour les Juifs, il est le médiateur par qui le peuple reçoit la Loi et l’alliance. Pour les chrétiens, il préfigure le Christ, que le Nouveau Testament voit comme un nouveau Moïse. Jésus actualise la Loi et interprète sa mise en pratique. Le Coran voit en lui un précurseur de Mahomet. Moïse est donc commun aux trois monothéismes qu’il a contribué à façonner.

A la fois figure royale, médiateur de la loi, intercesseur qui ose contester les projets de Dieu, Moïse est à la fois héroïque et faible, profondément humain, ambivalent, saisi par le doute et confronté à l’échec, il ne mettra en effet jamais les pieds en terre promise. Son personnage est à la fois très connu et reste pourtant énigmatique. Qu’a-t-il vu dans le buisson ardent ? Que s’est-il vraiment passé au Sinaï ? Est-ce lui qui a inventé le monothéisme ?

Très tôt, on s’est interrogé sur l’origine et le sens des différents récits de l’histoire de Moïse. Des chercheurs ont mené de véritables enquêtes sur les textes. Les artistes se sont emparés d’eux pour les mettre en image, pour en donner leur vision. Ils ont ainsi transmis l’héritage mosaïque au fil des siècles.

Bernadette Neipp s’attachera à commenter la façon qu’ont eue les artistes de comprendre le prophète, elle analysera aussi bien les fresques de la synagogue de Doura Europos en Syrie que celles de Chagall, des œuvres de Michel Ange, de Rembrandt et de Raphaël. Elle a également retenu la figure du patriarche représenté sur l’un des piliers du porche de la cathédrale de Lausanne, et qui porte des cornes. Un attribut qu’on lui prête souvent et qui, selon Thomas Römer, a deux explications possibles : Ces cornes viendraient de la traduction latine d’un mot hébreu qui veut dire à la fois lumière et corne. Dans la Vulgate, Moïse revient du Sinaï couronné de cornes, à moins qu’elles ne soient l’esquisse de deux rais de lumière tombant sur sa tête. Autre explication possible : les cornes sont un attribut divin, signe de puissance et de fertilité, dont les artistes auraient gratifié le prophète.