Vaud:Pour casser les images véhiculées par l'antisémitisme, protestants, catholiques et Juifs dialoguent autour du repas pascal
13 février 2007
Le dialogue entre Juifs, catholiques et protestants est particulièrement vivant dans le canton de Vaud
En témoigne le spectacle « Pourquoi ce pain, pourquoi ce vin ? », élaboré autour du repas pascal par la Commission de coordination Eglises et Judaïsme, qui aura lieu dimanche 18 mars à Morges. Un rabbin, un prêtre et un pasteur s’interrogent mutuellement sur leurs traditions respectives autour de Pâques et témoignent des liens qui les unissent. Un signe fort d’estime mutuelle et d’amitié que salue à Lausanne le rabbin Alain Nacache, pour casser les images que véhicule l’antisémitisme. Interview.Partager le pain et le vin est un geste fort, aussi bien pour les Juifs que pour les chrétiens, même s’il a une signification symbolique différente pour les uns et les autres. Se mettre à table ensemble témoigne d’un dialogue assez unique, que j’ai découvert à mon arrivée à Lausanne, il y a bientôt une année, et que j’aimerais bien voir s’étendre à la France. Monter ensemble un projet comme celui-ci, c’est plutôt rare et enthousiasmant! Nos rencontres interreligieuses, qu’elles aient lieu dans le cadre de la Commission de coordination Eglises et Judaïsme ou à la Maison de l’Arzillier, se déroulent dans une ambiance formidable. Je ne suis jamais angoissé avant de m’y rendre. Lorsque des responsables de communautés religieuses différentes tissent des liens d’amitié, se trouvent sur la même longueur d’ondes et qu’ils témoignent de cette confiance réciproque auprès de leurs communautés respectives, celles-ci peuvent mieux comprendre que les querelles théologiques n’ont en fait aucune importance !Ce partage et ce dialogue sont-ils suffisants pour contrer la recrudescence de certains gestes et agressions verbales antisémites ? Ce que nous faisons ensemble est peut-être un travail de fourmi, mais il nous permet de nous rapprocher les uns des autres et de faire avancer les mentalités, d’empêcher qu’un antisémitisme «de bon aloi » ne dérape. On prouve ainsi qu’on peut parfaitement vivre ensemble dans une société moderne et démocratique, sans pour autant nier les valeurs morales et éthiques de la tradition qui nous fonde.Vous parlez avec un certain détachement résigné de cet antisémitisme « de bon aloi » dont votre communauté est parfois victime ici, en Suisse. Les Juifs ont toujours vécu avec l’antisémitisme. C’est une donnée de la vie de notre peuple. Nous avons une sorte de radar intérieur qui nous permet de détecter si les gestes antisémites à notre égard sont plus graves que d’habitude, s’ils sont les prémisses d’une montée en puissance de l’antisémitisme. Or, nous savons où ces dérapages peuvent nous mener. Chaque fois qu’il y a recrudescence du conflit au Proche-Orient, nous nous faisons agresser verbalement et nous sommes la cible de menaces. Ce qui nous inquiète, c’est ce que le pouvoir politique et les médias font de ces gestes antisémites. Si notre communauté ne réagit pas à ces agressions, les gens peuvent se mettre à penser que ces gestes sont normaux. Si nous dénonçons ces vindictes, on nous traite volontiers d’être parano. Moi, ça me va assez bien d’être parano. Ca nous a sauvés par le passé.