L’Eglise catholique suscite un tollé en s’affirmant seule Eglise du Christ
10 juillet 2007
La Conférence des évêques suisses, visiblement embarrassée, donne une interprétation du document de la Congrégation vaticane pour la Doctrine de la foi favorable à la poursuite des efforts en faveur de l’œcuménisme
Du côté protestant, l’inquiétude et la tristesse sont générales. De l’Alliance réformée mondiale à la Fédération des Eglises protestantes de Suisse, en passant par la Conférence des Eglises protestantes romandes, on condamne le « repli sur soi » de l’Eglise catholique, qui fait fi des acquis du dialogue oecuménique.Pour ceux qui en doutaient, voici une nouvelle preuve : devenu Benoît XVI, Joseph Ratzinger n’a pas changé. En septembre 2000, alors préfet de la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi, il affirmait, dans un document intitulé Dominus Iesus, que l’Eglise catholique était seule à réaliser concrètement l’unique Eglise de Jésus-Christ. Les Eglises protestantes et le Conseil œcuménique des Eglises avaient déjà vigoureusement manifesté leur désaccord. Le nouveau préfet de la doctrine romaine, le cardinal William Levada, a publié mardi une « Réponse à des questions concernant certains aspects de la doctrine sur l’Eglise » qui réaffirme la même thèse, sans aucun souci des protestations réformées enregistrées à l’époque. L’Eglise réalisée par Jésus-Christ subsiste (en latin, substituit in) dans la seule Eglise catholique, dit le texte, qui a été ratifié et confirmé par Benoît XVI.
« Le document rendu public le 10 juillet donne malheureusement une interprétation de la constitution de l’Eglise (Lumen Gentium) qui nous ramène à la façon de penser et à l’atmosphère qui prévalait avant Vatican II. Ce n’est pas bon pour la confiance mutuelle que nous développons au travers de nos dialogues avec l’Eglise catholique romaine », écrit par exemple le secrétaire général de l’Alliance réformée mondiale, le pasteur Setri Nyomi, dans une lettre adressée au Cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Le document de la Congrégation pour la doctrine de la foi rappelle que dans une conception catholique, les Communautés ecclésiales issues de la Réforme ne peuvent pas être dénommées comme « Eglises au sens propre ». De telles déclarations perturbent le dialogue œcuménique entre catholiques et réformés. « Nous nous demandons avec quel sérieux l’Eglise catholique romaine aborde son dialogue avec les familles d’Eglises réformées et les autres familles d’Eglise. Nous nous demandons si nous sommes bel et bien en train de prier ensemble pour l’unité des chrétiens » poursuit Setri Nyomi, relevant « le caractère inapproprié » du moment choisi pour ce message, alors que les résultats de la troisième série de dialogue entre catholiques et réformés sont sur le point d’être dévoilés. « Nous chérissons la relation que nous entretenons avec vous et nous tournons vers vous pour trouver une explication à la publication de ce document », conclut-il.
La Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) constate non sans inquiétude que "l’Eglise catholique romaine, en se reliant sur elle-même, s’exclut de la communion universelle des Eglises ». Dans la conception protestante, l’Eglise est partout où l’on prêche, où l’on célèbre la Cène et administre le baptême conformément à l’esprit de l’Evangile, et où l’Eglise assume sa responsabilité envers le monde. Un des éléments essentiels de cette conception est que l’Eglise n’est pas elle-même la vérité, mais a pour mission de faire voir la vérité en Jésus-Christ. Les Eglises de la Réforme peuvent donc se considérer comme des Eglises à part entière et regarder l’Eglise catholique romaine comme une Eglise sœur ».
Antoine Reymond, président de la Conférence des Eglises protestantes romandes (CER), relève la question de la succession apostolique, qui veut, selon la conception catholique, que chaque prêtre et chaque évêque soient les successeurs directs des apôtres ayant reçu leur mandat de Jésus. Les protestants, qui croient au « sacerdoce universel » des fidèles, et dont les pasteurs ne se différencient que par leur fonction, n’ont pas un sacerdoce « valide », selon le document publié. « Y a-t-il moins de fidélité apostolique chez Dietrich Bonhoeffer (pasteur protestant résistant mis à mort par le régime nazi, ndlr.) que dans un évêque allemand qui a collaboré ? La succession apostolique n’est pas une chaîne ininterrompue dans l’histoire, mais une fidélité à la foi à travers l’histoire. Il existe des travaux de théologiens à ce sujet, et on dirait qu’ils n’existent pas. » Antoine Reymond redoute que « nous n’ayons encore pas tout vu. Rome prépare un argumentaire pour justifier le texte de Dominus Iesus. Je rencontre beaucoup de catholiques inquiets d’une Eglise qui fait passer l’exclusion avant la charité ; pensons à ceux qui veulent poursuivre le dialogue et gardons le cap. C’est le moment de dire que nous ne sommes pas d’accord avec cette stratégie du Vatican, que nous en souffrons et que nous la refusons au nom de notre fraternité ».
De son côté, la Conférence des évêques suisses (CES) a tenté hier de relativiser la portée du message. « Il faut l’aborder dans une perspective de dialogue et de rapprochement futur », explique Walter Müller, chargé d’information. « Afin de pouvoir dialoguer, il faut être au clair sur nos bases réciproques. Nous espérons vivement que ce document sera compris ainsi, car cela n’aurait aucun sens de faire un pas en arrière ». Cependant, le Vatican ne montre-t-il pas davantage de signes de reconnaissance envers l’Eglise orthodoxe, qualifiées d’ « Eglises particulières ou locales » parce qu’elles ne reconnaissent pas la primauté de Rome ? « En Suisse, notre premier souci est l’œcuménisme avec les protestants. Mais sur un plan mondial, les choses se présentent peut-être différemment », conclut Walter Müller.
« Le document rendu public le 10 juillet donne malheureusement une interprétation de la constitution de l’Eglise (Lumen Gentium) qui nous ramène à la façon de penser et à l’atmosphère qui prévalait avant Vatican II. Ce n’est pas bon pour la confiance mutuelle que nous développons au travers de nos dialogues avec l’Eglise catholique romaine », écrit par exemple le secrétaire général de l’Alliance réformée mondiale, le pasteur Setri Nyomi, dans une lettre adressée au Cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Le document de la Congrégation pour la doctrine de la foi rappelle que dans une conception catholique, les Communautés ecclésiales issues de la Réforme ne peuvent pas être dénommées comme « Eglises au sens propre ». De telles déclarations perturbent le dialogue œcuménique entre catholiques et réformés. « Nous nous demandons avec quel sérieux l’Eglise catholique romaine aborde son dialogue avec les familles d’Eglises réformées et les autres familles d’Eglise. Nous nous demandons si nous sommes bel et bien en train de prier ensemble pour l’unité des chrétiens » poursuit Setri Nyomi, relevant « le caractère inapproprié » du moment choisi pour ce message, alors que les résultats de la troisième série de dialogue entre catholiques et réformés sont sur le point d’être dévoilés. « Nous chérissons la relation que nous entretenons avec vous et nous tournons vers vous pour trouver une explication à la publication de ce document », conclut-il.
La Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) constate non sans inquiétude que "l’Eglise catholique romaine, en se reliant sur elle-même, s’exclut de la communion universelle des Eglises ». Dans la conception protestante, l’Eglise est partout où l’on prêche, où l’on célèbre la Cène et administre le baptême conformément à l’esprit de l’Evangile, et où l’Eglise assume sa responsabilité envers le monde. Un des éléments essentiels de cette conception est que l’Eglise n’est pas elle-même la vérité, mais a pour mission de faire voir la vérité en Jésus-Christ. Les Eglises de la Réforme peuvent donc se considérer comme des Eglises à part entière et regarder l’Eglise catholique romaine comme une Eglise sœur ».
Antoine Reymond, président de la Conférence des Eglises protestantes romandes (CER), relève la question de la succession apostolique, qui veut, selon la conception catholique, que chaque prêtre et chaque évêque soient les successeurs directs des apôtres ayant reçu leur mandat de Jésus. Les protestants, qui croient au « sacerdoce universel » des fidèles, et dont les pasteurs ne se différencient que par leur fonction, n’ont pas un sacerdoce « valide », selon le document publié. « Y a-t-il moins de fidélité apostolique chez Dietrich Bonhoeffer (pasteur protestant résistant mis à mort par le régime nazi, ndlr.) que dans un évêque allemand qui a collaboré ? La succession apostolique n’est pas une chaîne ininterrompue dans l’histoire, mais une fidélité à la foi à travers l’histoire. Il existe des travaux de théologiens à ce sujet, et on dirait qu’ils n’existent pas. » Antoine Reymond redoute que « nous n’ayons encore pas tout vu. Rome prépare un argumentaire pour justifier le texte de Dominus Iesus. Je rencontre beaucoup de catholiques inquiets d’une Eglise qui fait passer l’exclusion avant la charité ; pensons à ceux qui veulent poursuivre le dialogue et gardons le cap. C’est le moment de dire que nous ne sommes pas d’accord avec cette stratégie du Vatican, que nous en souffrons et que nous la refusons au nom de notre fraternité ».
De son côté, la Conférence des évêques suisses (CES) a tenté hier de relativiser la portée du message. « Il faut l’aborder dans une perspective de dialogue et de rapprochement futur », explique Walter Müller, chargé d’information. « Afin de pouvoir dialoguer, il faut être au clair sur nos bases réciproques. Nous espérons vivement que ce document sera compris ainsi, car cela n’aurait aucun sens de faire un pas en arrière ». Cependant, le Vatican ne montre-t-il pas davantage de signes de reconnaissance envers l’Eglise orthodoxe, qualifiées d’ « Eglises particulières ou locales » parce qu’elles ne reconnaissent pas la primauté de Rome ? « En Suisse, notre premier souci est l’œcuménisme avec les protestants. Mais sur un plan mondial, les choses se présentent peut-être différemment », conclut Walter Müller.