"Vivant jusqu'à la mort": la dernière méditation du philosophe Paul Ricoeur
31 juillet 2007
« Il y a deux choses difficiles à accepter dans la vie, à accepter vraiment
La première est qu’on est mortel, la seconde, que l’on ne peut être aimé de tout le monde ». Consignée dans une chemise cartonnée, la méditation que Paul Ricoeur a entamée en 1995, à l’âge de 83 ans, puis interrompue, sur l’apprentissage du « devoir-mourir-un-jour », l’angoisse du néant et le deuil à faire de toute représentation d’une survie après la mort, vient d’être publiée, deux ans après sa mort, sous le titre« Vivant jusqu’à la mort ».Ce texte vif, écrit par bribes au fil des jours, et interrompu en avril 1997, peu avant la mort de sa femme Simone, permet littéralement de « voir » se développer et s'affiner la pensée du philosophe protestant, toujours au plus près de la vie. Il est un témoignage qui rejoint les préoccupations de tout un chacun, quand vient le temps de la question : « Ai-je existé en vain ? ». « La question du sens peut-elle être pensée comme récapitulation de l’existence ? », se demande Paul Ricoeur, qui préconise le détachement de soi-même, un lâcher prise envisagé, non pas comme un renoncement négatif, mais comme un allégement positif. Il appuie son propos sur les Evangiles synoptiques, qui chacun à leur manière, répètent que « qui cherchera à conserver son existence la perdra, - et qui la perdra, la maintiendra vivante ».
Paul Ricoeur pense qu’il faut se vider de tout souci de son propre salut. Pas question pour autant d’une sorte d’ascèse stoïcienne qui serait une préparation à la mort, une anticipation de sa propre agonie, ce qui ne peut qu’entamer l’énergie et le goût de vivre et constitue le noyau concret de la peur de la mort. Il faut rester jusqu’au bout parmi les autres, bien vivant et ampli de gratitude.
Pour le philosophe, né et grandi dans la foi chrétienne de tradition réformée, « la mémoire de Dieu est pardon au sens plus que juridique d’acquittement ou de rachat, au sens de proximité retrouvée ». Il ne cherche pas dans la résurrection une forme de survie de soi, estimant qu’il faut faire le deuil d’une volonté d’exister après la mort. Il met sa confiance en Dieu. « Je dis : Dieu, tu feras ce que tu voudras de moi. Peut-être rien. J’accepte de n’être plus ». Alors, écrit-il encore, une autre espérance que le désir de continuer d’exister, se lève ». Dur et tardif apprentissage que le philosophe fait, pour juguler l’angoisse qu’il éprouva face à la lente agonie de sa femme. Pour rester vivant jusqu'à la fin, il multiplia les rencontres, les voyages, remplit son agenda de rendez-vous et de conférences. Paul Ricoeur, « Vivant jusqu’à la mort, suivi de Fragments », 145 pages, 2007, éditions du Seuil.
Paul Ricoeur pense qu’il faut se vider de tout souci de son propre salut. Pas question pour autant d’une sorte d’ascèse stoïcienne qui serait une préparation à la mort, une anticipation de sa propre agonie, ce qui ne peut qu’entamer l’énergie et le goût de vivre et constitue le noyau concret de la peur de la mort. Il faut rester jusqu’au bout parmi les autres, bien vivant et ampli de gratitude.
Pour le philosophe, né et grandi dans la foi chrétienne de tradition réformée, « la mémoire de Dieu est pardon au sens plus que juridique d’acquittement ou de rachat, au sens de proximité retrouvée ». Il ne cherche pas dans la résurrection une forme de survie de soi, estimant qu’il faut faire le deuil d’une volonté d’exister après la mort. Il met sa confiance en Dieu. « Je dis : Dieu, tu feras ce que tu voudras de moi. Peut-être rien. J’accepte de n’être plus ». Alors, écrit-il encore, une autre espérance que le désir de continuer d’exister, se lève ». Dur et tardif apprentissage que le philosophe fait, pour juguler l’angoisse qu’il éprouva face à la lente agonie de sa femme. Pour rester vivant jusqu'à la fin, il multiplia les rencontres, les voyages, remplit son agenda de rendez-vous et de conférences. Paul Ricoeur, « Vivant jusqu’à la mort, suivi de Fragments », 145 pages, 2007, éditions du Seuil.