Un livre pour redécouvrir Pierre Viret
Arthur-Louis Hofer s’illumine dès qu’il s’agit de parler du trio formé par Guillaume Farel, Jean Calvin et Pierre Viret, qui, au 16e siècle, a complètement et durablement bouleversé le paysage religieux. Sur cette « triade d’élite », le pasteur lausannois est intarissable. Il se désole de voir que bien peu de gens savent encore qui était Pierre Viret qui, à l’instigation de Guillaume Farel, s’est mis à gagner de nombreux Vaudois à la Réforme.
Le trio Farel, Calvin et ViretLes deux hommes se sont rencontrés en 1531 à Orbe, où Farel est venu prêcher. Pierre Viret a alors dix-neuf ans, il a étudié à Paris, au collège Montaigu, que fréquentèrent Erasme, Ignace de Loyola et Jean Calvin. Touché par la grâce de Dieu, il est séduit, à la suite de sa rencontre avec Antoine Saulnier, par les idées de la Réforme. Guillaume Farel le repère dans l’assemblée d’Orbe et lui demande de prendre soin de ceux qui viennent de se convertir.
Le 6 mai 1531, Viret délivre sa première prédication dans sa ville natale. Il s’impose peu à peu, par la douceur, bien plus que par des effets de manche. « Personne n’a tonné aussi fort que Farel, personne n’a été aussi érudit que Calvin, personne n’a été aussi éloquent que Viret, personne n’a proclamé sa foi avec plus de douceur », résume le spécialiste.
La dispute de Lausanne
Et Arthur-Louis Hofer de rappeler la fameuse Dispute de Lausanne, controverse qui eut lieu dans la cathédrale en octobre 1536, et opposa Farel, Calvin et Viret à des partisans de l’ancienne foi, dont peu intervinrent, l'Eglise catholique interdisant à tous ses membres de disputer avec des « hérétiques ».
Les trois Réformateurs y affirment que l’homme est justifié par la foi seule, sans les oeuvres. Ils s’insurgent contre les prérogatives de Rome et le fait que seule la haute hiérarchie de l’Eglise, avant tout le Pape, soit habilitée à interpréter les Ecritures. Ils rappellent les paroles du Christ : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux ».
L’auditoire est subjugué par l’intervention de Calvin, alors très jeune. Pierre Viret invite la foule à se tourner vers Jésus, seul Sauveur. Il exhorte les délégués de Berne, présents à cette disputation, à la non-violence : « Que le sang humain ne soit pas répandu, que l’homme qui est fait à l’image de Dieu ne tue pas celui qui est fait aussi à la même image… et que tous ceux qui ont à souffrir pour la foi en Jésus soient fortifiés et persévèrent jusqu’à la fin… » .
La statue de Notre-Dame de Lausanne briséePour impressionner la foule lors de la Dispute, les chanoines avaient sorti, du lieu où elle se trouvait, la statue de la Vierge baptisée Notre-Dame de Lausanne. Hostiles au culte des images, les Réformés brisent la statue. « Pour Viret, le culte de Marie et des Saints est nul et non avenu, explique Arthur-Louis Hofer, c’est Dieu et seul Lui qu’il faut prier. Viret s’insurge contre toutes les prières adressées à Marie, et même contre le Notre Père prié devant les statues des saints ».
En 1544, le Réformateur vaudois précise sa pensée dans un petit livre illustré d’exemples pratiques, « Du vrai usage de la salutation faite par l’ange à la Vierge Marie ». L’ouvrage, en réédition, sort dans le courant de l’automne grâce au soutien de l’association Pierre Viret.