Vraie, l'histoire de la crèche ?Enquête sur les origines de Noël, entre vérité et merveilleux
Pour les esprits rationnels à la recherche de renseignements fiables, tout commence mal: c’est en effet un ange qui, dans l’Evangile de Luc, annonce la naissance de Jésus à Marie, une jeune Juive fiancée à un certain Joseph, descendant du roi David. Autant dire que ce messager de Dieu est une créature plutôt énigmatique, propre à développer le sens du merveilleux, mais pas à conforter les historiens dans des certitudes.
C’est aussi un ange, cette fois-ci dans l’Evangile de Matthieu, qui dissuade Joseph de congédier sa promise, quand il apprend qu’elle est enceinte. C’est encore un ange qui apparaît la nuit aux bergers dans les champs avec leurs troupeaux, pour leur annoncer qu’un Sauveur est né, et qu’ils le trouveront emmailloté et couché dans une crèche à Bethléem, en Judée. Arrivés dans la bourgade, ils découvrent bien Marie, Joseph et le nouveau-né dans une crèche. Voyant que l’annonce de l’ange correspond à la réalité, ils font connaître la nouvelle autour d’eux. Ils sont, en quelque sorte, les premiers évangélistes.
Du bœuf et de l’âne, qui auraient été présents dans la crèche ou la grotte, le récit de Luc n’en souffle mot. On les trouve par contre dans l’Evangile du Pseudo-Matthieu, un écrit apocryphe composé après les quatre Evangiles canoniques, dont l’imagerie populaire s’empare dès le Moyen-Age. De nombreuses scènes, que nous sommes habitués à considérer comme « évangéliques », sont en réalité tirées exclusivement de ces histoires parallèles que l’Eglise, au 4ème siècle, n’a pas retenues dans sa liste des textes officiellement reconnus. Malgré cette mise à l’écart, ces textes ont exercé une fascination sur les esprits, par leur poésie et l’abondance de détails narratifs, quelquefois tout à fait invraisemblables.
Pour avoir un récit plus détaillé de la Nativité que celui de Luc, il faut se référer à l’un des textes apocryphes les plus anciens, le Protévangile de Jacques, qu’on estime avoir été écrit vers 130. C’est la source principale de toutes les scènes liées à la conception, à l’enfance, à la présentation au Temple de Marie. On y trouve un épisode peu connu, celui de la sage-femme que Joseph est allé chercher et qui, constatant, incrédule, la virginité de Marie, se met à entonner un chant à la gloire de la naissance prodigieuse du Sauveur d’Israël.
Pour en savoir plus sur les rois mages, évoqués brièvement dans l’Evangile de Matthieu, il faut se référer aux récits pseudo-évangéliques d’origine orientale, grecque et arménienne. Selon les textes apocryphes arméniens, le lieu de départ des mages serait la Perse. Ce n’est qu’après le 14ème siècle que les rois mages sont devenus les représentants des trois âges de la vie, de trois races ou de trois continents différents. Intrigués par cet étrange peuple d’Israël qui ne croit qu’en un seul Dieu, ils sont les premiers témoins non juifs de la naissance de Jésus.
A quand remonte la naissance de Jésus ?
Quand tout cela s’est-il passé exactement ? Là encore, les esprits rationnels n’ont pas de date précise, certifiée historiquement authentique, à se mettre sous la dent. Les textes bibliques ne disent rien de la date à laquelle se situe la naissance de Jésus et il n’y a guère de traces de la célébration de sa naissance avant le début du 4ème siècle. L’idée de célébrer l’anniversaire de la naissance du Christ semble avoir complètement échappé aux premières générations de chrétiens, qui avaient plutôt l’habitude de se rassembler au printemps pour marquer sa résurrection.
C’est l’empereur romain Constantin, rallié tardivement à la foi chrétienne, qui décide, en l’an 321 de notre ère, de célébrer cet anniversaire à la date du solstice d’hiver. Il veut substituer à la fête païenne de l’adoration du Dieu soleil et du retour à la lumière, celle du Christ, « lumière qui éclairera les nations » (Luc 2,32). Il choisit le 25 décembre. L’acceptation de cette date ne se fait que lentement, même parmi les chrétiens. La résistance est particulièrement vive en Orient, où la fête de l’Epiphanie, le 6 janvier, demeure aujourd’hui encore le Noël des Orientaux. La date du 25 décembre fait aujourd’hui encore débat entre l’Eglise d’Orient et celle d’Occident.
Tout ça pour quoi ?
Mais quel est le sens de Noël ? Pour les chrétiens, ce moment fort de l’année liturgique rappelle l’accueil du Dieu unique, révélé au peuple juif en Jésus de Nazareth comme Dieu de l’univers entier. C’est une annonce de bienveillance et de paix envers les hommes, ainsi qu’entre les hommes. Le message, d’où qu’on l’entende, n’a pas perdu de son actualité.