La bague au doigt, lien d'amour, fil à la patte ou vestige d'un amour enfui ?Récits intimes recueillis par la journaliste Marlyse Tschui

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La bague au doigt, lien d'amour, fil à la patte ou vestige d'un amour enfui ?Récits intimes recueillis par la journaliste Marlyse Tschui

10 juin 2008
« Si je ne portais pas mon alliance, je ne serais pas totalement moi-même
Elle me rappelle que j’ai été un homme aimé ! » Tous les témoignages recueillis par Marlyse Tschui, journaliste à l’hebdomadaire Femina, dans le petit livre qu’elle a consacré à « la bague au doigt », ne reflètent pas forcément l’attachement émouvant de cet homme à sa femme disparue. En discutant alliance à la suite de son divorce, la journaliste constate que la question est loin d’être anodine. Mariés, pacsés, divorcés, célibataires ou veufs : elle se met à recueillir leurs récits de vie et s’aperçoit que chacun donne à ce petit objet une valeur différente. Rencontre.« Quand j’ai divorcé, je me suis demandé ce que j’allais faire de mon alliance, symbole d’un amour qui s’était cassé la figure. Je ne voulais pas m’en débarrasser de façon moche, mais j’avais aussi besoin de pouvoir tourner la page et partir vers autre chose ». De sa propre perplexité face à ce petit anneau devenu soudain à ses yeux bien encombrant, Marlyse Tschui va tirer un livre empreint d’humanité. On y côtoie les histoires intimes de ceux qui ont jeté leur alliance aux orties ou l’ont oubliée au fond d’un tiroir ; qui l’enlèvent subrepticement et la cachent dans une poche, ou qui jurent leurs grands dieux qu’ils n’en porteront jamais au nom de leur sacro-sainte indépendance ; on découvre celles qui rêvent d’avoir la bague au doigt pour quitter le statut de femme seule, souvent considéré avec suspicion comme celle qui n’a pas su garder un homme. On découvre aussi dans ce livre les témoignages de ceux qui, enfin, sont soulagés de pouvoir afficher au grand jour, par le biais d’une alliance, qu’ils ont un compagnon au long cours de même sexe. On y trouve aussi les confidences de celles et ceux qui ont hérité des alliances de leurs parents, de leur grand-mère ou d’une personne proche dans la famille.

« J’ai retrouvé un jour les alliances de mes parents dans un tiroir, raconte Marlyse Tschui. Le nom de ma mère était gravé dans l’alliance de mon père. Dans celle de ma mère, on ne pouvait presque plus rien lire. Elle était usée. Les travaux ménagers avaient effacé peu à peu ce qui y avait été gravé. Le fait de retrouver les alliances de mon père et de ma mère a été beaucoup plus fort pour moi que de regarder des photos d’eux dans un album. J’ai soudain revu leurs gestes, leurs mains. J’ai réalisé à quel point l’alliance fait partie de la personne qui la porte. Quand elle décide de l’ôter, il reste souvent pendant un certain temps des traces de cette bague sur le doigt. Comme si l’alliance avait été gravée dans la chair et qu’en l’ôtant, c’est une petite partie de soi qu’on enlève ». Marlyse Tschui, "La bague au doigt", 131 pages, mai 2008, éditions Anne Carrière.