Kofi Annan honoré à Neuchâtel: "Il est urgent d'enrayer la faim dans le monde et la dégradation du climat"

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Kofi Annan honoré à Neuchâtel: "Il est urgent d'enrayer la faim dans le monde et la dégradation du climat"

4 novembre 2008
Personnalité au parcours riche, Kofi Annan est convaincu de la « capacité des êtres humains à changer le monde pour le meilleur », selon ses mots prononcés le samedi 1er novembre lors du Dies Academicus de l’Université de Neuchâtel
L’ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et prix Nobel de la paix y recevait un doctorat honoris causa, en reconnaissance de sa contribution à la paix, à la sécurité, la justice et l’équité entre les nations. L’occasion de mettre sa notoriété au service d’un message.Distingué à Neuchâtel d’un titre honoris causa, Kofi Annan était invité à s’exprimer sur les défis de l’égalité, dont il s’est fait le témoin, habité de convictions et d’espérance. « Le monde peut changer, nous pouvons le changer », a-t-il souligné, s’adressant en particulier aux plus jeunes. « Il est dommage que tant de personnes perdent cette conviction, car ce sont les bases du progrès. Ne croyez pas que rien ne peut être fait. Ne laissez personne, au nom du réalisme, éteindre l’optimisme que vous sentez ».

Il a rappelé à quel point le monde est interconnecté comme jamais auparavant. Prenant l’exemple de la crise économique, il s’est inquiété que celle-ci relègue à plus tard les défis de la pauvreté, de l’éducation, des droits humains et de l’environnement, des objectifs considérés comme « un luxe, souhaitable mais hors de prix pour l’instant ». Un point de vue inacceptable pour Kofi Annan, lui qui voit les notions de justice sociale et d’équité comme conditions à la paix, et convaincu que le nerf de cette paix est dans le cœur des hommes, pas dans leurs moyens financiers. « Les gens se mobilisent avec très peu d’argent, mais avec une volonté extraordinaire. Ce genre de pression est nécessaire pour faire bouger des politiciens ». Regard complice à la représentante politique présente.

Kofi Annan s’est vu remettre les plus hautes récompenses, comme le prix Nobel de la paix en 2001, et les plus modestes, comme à Neuchâtel, petite Université sur le plan mondial. Peu importe l’échelle, il saisit chaque opportunité pour transmettre son message. « Quand j’ai l’occasion de parler avec des jeunes universitaires, c’est une chose très importante, qui m’est très chère. C’est le contact humain, les discussions et l’engagement qui comptent ». La valeur du témoignage ? « Oui. Il y a de ça. La valeur du témoignage de ce que le monde attend. Moi, si vous voulez, je suis un petit exemple. Mais les jeunes ont beaucoup à faire. Et j’espère que cela va les inspirer ». Refusant poliment les entretiens privés avec des journalistes, il se laisse aborder par des étudiants au terme de la réception.

La présence de Kofi Annan est digne, presque rigide. La voix, grave et discrète, fait étrangement contraste avec la force des mots choisis. Elle confère d’une part un sérieux austère au propos, et incite d’autre part à l’écoute attentive. Sérieux, le propos l’est dans son appel à faire encore des progrès en matière de développement, de lutte contre la crise alimentaire et devant le changement climatique. Avec la crainte que ces fardeaux retombent sur les plus pauvres. Et avec la foi profonde dans le besoin d’« institutions efficaces de bonne gouvernance dans chaque pays et sur le plan international ».

Conscient du rôle que joue sa notoriété quant aux causes qu’il défend, Kofi Annan apprécie aussi les rares moments d’anonymat. Il en a profité samedi après-midi pour se promener en ville de Neuchâtel avec son épouse, dont la famille a des origines neuchâteloises. Kofi Annan y venait pour la première fois. Des passants ont remarqué cet homme expérimenté à l’allure digne, certains croyant reconnaître l’acteur Morgan Freeman. Une ressemblance dont Kofi Annan s’amuse, lui qui avouait plus tôt avoir déjà signé un autographe « K. Freeman », pour honorer à la fois le souhait d’un cinéphile admiratif en pleine confusion, et garder son anonymat alors préservé.