Les Eglises du Sud-Soudan saluent la naissance du nouvel Etat
Les responsables d'Eglise ont organisé des prières d'action de grâce le 10 juillet, au lendemain de l'investiture du général Salva Kiir Mayardit en tant que premier président du Sud-Soudan, à laquelle ont assisté des milliers de personnes à Juba. « Nous restons disposés à assumer notre rôle en délestant le gouvernement du Sud-Soudan d'une partie des responsabilités qui lui incombent », a déclaré l'archevêque Daniel Deng Bul, de l'Eglise épiscopale (anglicane) du Soudan, dans une lettre pastorale rendue publique à l'occasion de l'indépendance du pays.
Sud-Soudan : 54e Etat d'AfriqueLe général Kiir est à la tête du 54e Etat d'Afrique. Les quelque 9,7 millions d'habitants du Sud-Soudan sont aux prises avec de graves problèmes économiques et sociaux. La majeure partie de la population vit avec moins d'un dollar par jour, plus de 10% des enfants meurent avant l'âge de cinq ans et plus de 75% des adultes ne savent ni lire, ni écrire.
Même si les Eglises célèbrent l'indépendance – elles ont joué un rôle de premier plan au cours des 50 années de lutte pour y parvenir –, l'archevêque Deng a affirmé que son Eglise est consciente des nombreux écueils auxquels le nouveau gouvernement devra faire face avant que l'autonomie ne porte ses fruits.
Pétrole, source de convoitisePour l'archevêque, les dossiers les plus sensibles sont ceux de la région riche en pétrole d'Abyei, qui est contestée par le nord et le sud, la démarcation de la frontière entre les deux pays, et la montée de l'insécurité due aux milices.
Peu après avoir été investi président, le général Kiir a souhaité tendre la main aux milices rebelles qui continuent de s'opposer à l'armée du Sud-Soudan. Sept groupes militaires sont en activité dans le nouvel Etat, selon les Nations Unies, qui estiment que plus de 800 personnes ont trouvé la mort dans des combats cette année.
« Je veux offrir l’amnistie à tous ceux qui ont pris les armes contre le peuple du Sud-Soudan. Qu'ils baissent leurs armes et nous aident à construire cette jeune nation », a déclaré le président Kiir dans un discours retransmis en direct à travers l'Afrique de l'Est.
Appel au pardonIl a par ailleurs appelé son peuple à pardonner au nord, l'ennemi juré de deux guerres civiles depuis 1955. « Un jour aussi heureux que celui-ci, on ne devrait pas revenir sur les mauvais souvenirs, mais il est important de reconnaître que pendant plusieurs générations, cette terre a connu des souffrances indescriptibles et de nombreuses mort. Nous avons été bombardés, mutilés, asservis et traités avec moins de considération que des réfugiés dans notre propre pays. Mais nous devons pardonner, même si nous n'oublierons pas », a déclaré le général Kiir.
Alors que les célébrations se poursuivaient au sud, le président soudanais Omar el-Béchir a déclaré à la BBC qu'Abyei était une source potentielle de conflit avec le nouvel Etat. Des combats dans cette région et une autre région frontalière, le Kordofan du Sud, ont contraint quelque 170 000 personnes à fuir leur foyer à l'approche de l'indépendance.
« Nous vous aiderons à faire un trait sur l'amertume du passé et nous espérons que vos ressources vous permettront d'aller de l'avant. Nous sommes convaincus que vous êtes conscients des difficultés qui vous attendent et que vous saurez les surmonter », a déclaré le président Béchir.
Crainte de voir la charia appliquéeSi la Constitution du nouvel Etat prévoit que toutes les religions soient traitées sur un pied d'égalité, au nord, un mouvement réclame l'application de la charia – la loi islamique – à tout le pays. Avant l'indépendance, les inquiétudes s'étaient manifestées quant à l'avenir de l'Eglise au nord.
« Je crois que l'Eglise va souffrir pendant quelque temps », a déclaré l'évêque catholique romain Rudolf Deng, du diocèse de Wau, dans une interview accordée au correspondant d'ENInews quelques jours avant l'indépendance. Cependant, a-t-il ajouté, cette situation ne perdurera pas, car la plupart des musulmans sunnites au nord sont « pragmatiques » et se rendent bien compte qu'ils doivent coexister avec les autres religions.
Les Eglises affirment qu'elles resteront unies à travers les deux pays pendant cette période de transition. Elles s'efforceront ainsi de rester solidaires des chrétiens dans le vieux Soudan et d'apporter leur soutien dans la séparation. (747 mots-ENI-11-F-0082-JMP)