Paul Simon évoque son long et sinueux parcours spirituel

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Paul Simon évoque son long et sinueux parcours spirituel

19 janvier 2012
New York, le 19 janvier (ENInews-RNS\Kim Lawton) – L’auteur-compositeur américain Paul Simon affirme qu’il y a toujours eu une dimension spirituelle dans son travail. Cependant, les références manifestement religieuses que révèle son dernier album, «So Beautiful or So What», surprennent, y compris lui-même. Une artiste et critique chrétienne parle de l'artiste d'origine juive, aujourd'hui âgé de 70 ans, comme d'un « chroniqueur de Dieu par accident ».

Les chansons de cet album parlent de Dieu, d’anges, de la création, de pèlerinage, de prière et de la vie après la mort, indique l’agence Religion News Service (RNS). Selon l’artiste, les thèmes religieux n’étaient pas intentionnels, lui-même ne se considérant pas comme religieux. Dans un reportage de l’émission « Religion & Ethics NewsWeekly », diffusée sur la chaîne de télévision publique PBS, il a toutefois déclaré que le monde de la spiritualité le fascine.



« Je pense que c’est quelque chose qui effleure régulièrement mes réflexions », a expliqué l'auteur-compositeur dont la carrière s’étale maintenant sur un demi-siècle. « Je vois cela davantage comme un sentiment spirituel. J’ai conscience que c’est en moi et j’aime ce sentiment, quoique je ne le comprenne pas vraiment. »

Meilleur album chrétien de 2011 ?

Si Paul Simon ne le comprend pas, il écrit et chante néanmoins beaucoup sur ce sujet, ce qui ne laisse pas indifférent. Dans son blog, un Irlandais affirme que « So Beautiful or So What » pourrait être le meilleur album chrétien de 2011. Pour Cathleen Falsani, une évangélique qui a produit de nombreux écrits sur la religion et la culture pop, l’album est « l’une des collections de réflexions spirituelles musicales les plus marquantes » de ces dernières années.



L’œuvre de Paul Simon a été maintes fois récompensée, notamment par une douzaine de Grammys. Le premier d’entre eux, il l’a reçu avec son partenaire musical Art Garfunkel en 1968 dans la catégorie « meilleur duo vocal contemporain ». En 1970, leur chanson « Bridge Over Troubled Water » , influencée par la musique gospel, a également été récompensée d’un Grammy. Dans la seconde partie de sa carrière, Paul Simon a exploré la musique du monde. En 1986, il sort l’album aux sonorités sud-africaines « Graceland », qui devient no 1 des ventes au Royaume-Uni, au Canada, en Nouvelle-Zélande et en Australie.



Paul Simon est d’origine juive et a grandi dans le quartier new yorkais de Queens. « J’ai fait ma Bar Mitsvah et j’ai reçu une certaine éducation juive, mais cela ne m’intéressait absolument pas », a-t-il affirmé. Aujourd’hui âgé de 70 ans, il explique qu’il se pose de nombreuses questions sur Dieu. Dans sa chanson intitulée « The Afterlife » , il spécule sur ce qui se passe après la mort. Il s’imagine faire la queue comme dans une administration.

Comme il le chante dans le refrain, « on doit d’abord remplir un formulaire puis faire la queue. » (You got to fill out a form first and then you wait in the line).


Prédication d'un pasteur afro-américain

Mais cette chanson se fait plus sérieuse dans les couplets: « Face-à-face dans l’immensité de l’espace/ Tes mots disparaissent/ Et tu te sens nager dans un océan d’amour/ Et le courant est fort » (Face-to-face in the vastness of space/ Your words disappear/ And you feel like you're swimming in an ocean of love/ And the current is strong).



« Quand on se retrouve finalement face à Dieu, aucune des questions qu’on pouvait se poser n’a d’intérêt », explique le chanteur.

L’une des chansons les plus originales de l’album, « Getting Ready for Christmas Day », inclut des extraits d’une prédication faite en 1941 par l’éminent pasteur afro-américain J. M. Gates Paul Simon a entendu la prédication parmi de vieux enregistrements et il a été fasciné par les rythmes du style « appel-réponse » qu'a utilisé le pasteur pour son sermon.

La chanson « Love and Hard Times » débute par cette phrase: « Dieu et son fils unique ont effectué une visite de courtoisie sur la Terre un dimanche matin » (God and His only son paid a courtesy call on Earth one Sunday morning).

Selon Paul Simon, « en commençant par une phrase qui est le fondement même du christianisme, je me suis dit: voilà qui va être intéressant. Que vais-je bien pouvoir dire sur un sujet que je ne maîtrise pas du tout? » La chanson s’achève sur une histoire d’amour, qui, affirme-t-il, parle de son épouse, et sur une répétition de la phrase « grâce à Dieu je t’ai trouvée » (Thank God I found you).

« Quand on cherche à remercier au plus haut niveau, il faut quelque chose de spécial, or ce "spécial", c’est Dieu. C’est de cela que parle la chanson », a-t-il expliqué.

« Beau travail ! »

Paul Simon affirme que la beauté de la vie et de la terre le conduit souvent à des réflexions sur Dieu. « Comment tout ceci a-t-il été créé ? Si la réponse à cette question est "Dieu a tout créé, il y a un créateur", alors je dis super ! Beau travail ! »

Il ajoute toutefois que cela ne lui posera pas de problème s’il s’avère que Dieu n’existe pas. « Eh bien d’accord, alors voilà une autre réponse. Je ne connais pas la réponse », dit-il. Quoi qu’il en soit, précise-t-il, « je ne suis ici qu’un grain de poussière pendant une nanoseconde, et j’en suis très reconnaissant. »

Paul Simon a cherché des réponses à ses questions auprès de leaders religieux, y compris le dalaï-lama. Un jour, il a eu une discussion de plusieurs heures avec le théologien évangélique britannique John Stott, décédé l’an dernier. Le musicien affirme que John Stott l’a beaucoup marqué. « Je l’ai quitté en ayant le sentiment de mieux comprendre d’où vient la croyance quand elle n’a pas de cadre précis », a-t-il déclaré.

« Chroniqueur de Dieu par accident »

Beaucoup de chansons de Paul Simon soulèvent des questions universelles sur des thèmes tels que la destinée et le sens de la vie. « Bien souvent, les gens lisent ou entendent dans mes chansons des choses qui, selon moi, sont plus proches de la vérité que ce que j’ai écrit », dit-il.
Cathleen Falsani qualifie Paul Simon de « chroniqueur de Dieu par accident ». Elle affirme qu’il « regarde le monde en se demandant comment celui-ci peut bien fonctionner, comme nous sommes nombreux à le faire. Il pose de bonnes questions et semble prendre spirituellement le pouls d’une culture. »

Paul Simon trouve gratifiant, quoiqu’un peu stupéfiant, que certaines personnes lui disent que Dieu leur a parlé à travers sa musique. « Est-ce une vérité profonde? Je ne sais pas », a-t-il admis. « J’ai l’impression d’être un vecteur; c’est passé à travers moi, j’ai fait les ajustements et j’en suis fier. »

(Cet article est basé sur une idée originale de «Religion & Ethics NewsWeekly», une émission de PBS.) (1072 mots-ENI-12-F-0006-JMP)