Entre voile et talons aiguilles, où commence la contrainte?

Voile ou talons aiguille: où est la soumission? / IStock
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Voile ou talons aiguille: où est la soumission?
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Entre voile et talons aiguilles, où commence la contrainte?

13 avril 2016
Protestinfo propose régulièrement des éditos rédigés par des membres des rédactions de Médias-pro. Laurence Villoz, journaliste à Protestinfo, revient sur la polémique suscitée par le port du voile en Europe et s’interroge sur les différents modèles de féminité.

 

Ces dernières semaines, la question du port du voile s’est emparée de la scène médiatique. Entre les hôtesses de l’air d’Air France contraintes de se voiler lorsqu’elles atterrissent sur le sol iranien, l’UDC valaisanne qui veut interdire le foulard à l’école et la nouvelle collection de hijabs de Dolce & Gabanna, le voile est partout. Critiqué, voire condamné, il effraie l’Occident qui l’associe au mieux à la soumission de la femme, au pire au terrorisme.

En Europe, ce symbole religieux et traditionnel semble aberrant autant aux défenseurs de la laïcité qu’aux femmes qui se sont battues pour leur émancipation. Et même si la majorité des musulmanes en Occident affirment le faire par choix personnel, la société ne veut ou ne peut pas y croire. La femme voilée est systématiquement perçue comme soumise à l’autorité d’un homme et incapable d’autodétermination. Mais qu’en est-il de la femme européenne? Les talons aiguilles ne reflètent-ils pas la domination masculine intégrée par excellence?

Objets de torture

Les talons hauts sont reconnus pour être particulièrement néfastes pour les pieds, voire pour le corps tout entier. Mais ces artifices, qui constituent de véritables objets de torture tout dépend le modèle, affinent la silhouette, mettent en valeur les jambes et surtout font partie des modèles de féminité occidentaux. Par ailleurs, la grande majorité des femmes qui en portent affirmeront le faire par choix personnel, mais au vu de l’inconfort physique qu’ils suscitent, n’est-ce pas plutôt une façon de répondre à des critères de beauté et de séduction édictés par la gent masculine? Parallèlement, si les hommes doivent eux aussi répondre à certains critères pour plaire, aucun artifice physiquement nuisible pour leur santé n’est requis par la société.

Avant de s’enflammer pour un foulard, je pense qu’il ne faut pas oublier que chaque société à ses codes vestimentaires. Le voile ne fait pas partie de ceux de la société occidentale, pour cette raison il choque. Mais la femme en Occident doit aussi répondre à l’image que la société attend d’elle, maquillée, coiffée, épilée et mince. Et toutes les femmes qui s’éloignent de ce modèle seront malheureusement critiquées, voire stigmatisées par la majorité. Plutôt que de susciter la peur et la controverse, le port du voile devrait nous pousser à nous interroger sur les différents modèles de féminité et leurs rapports à la soumission.