L’Eglise réformée bernoise, encore majoritaire, ne l’est plus pour très longtemps

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L’Eglise réformée bernoise, encore majoritaire, ne l’est plus pour très longtemps

1 mai 2007
Courageusement, le Conseil synodal (exécutif) des Eglises réformées Berne-Jura-Soleure a analysé en détail les résultats du recensement de la population en l’an 2000
S’il reste le plus grand canton protestant de Suisse en accueillant un quart des Réformés, cette Eglise doit s’attendre à devenir minoritaire dans quelques décennies.Le constat est frappant et devrait faire réfléchir les instances dirigeantes de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS), qui n’a pas établi un tel diagnostic. Aidé du professeur Kurt Lüscher, sociologue, et de Christoph Freymond, adjoint scientifique à l’Office fédéral de la statistique, le Conseil synodal des Eglises réformées Berne-Jura-Soleure (BE-JU-SO) ont souhaité dresser un portrait démographique de la population de leurs paroisses. But de l’opération : adapter la mission des Eglises réformées à l’évolution de la société et préparer ainsi l’avenir. Un tableau marquant révèle les cantons qui comptent une majorité de protestants en Suisse : Berne est le canton où résident le plus de citoyens réformés (un quart des protestants helvétiques y habitent), suivi de Zurich (21%) et du canton de Vaud (10%). Les autres cantons romands, soit Genève (3%), Neuchâtel (2%), Valais et Fribourg (1% chacun) se situent loin derrière les cantons d’Argovie, St Gall et même Bâle-Campagne.

Berne est le seul canton suisse à compter une majorité de protestants (63%) ; en outre, 27% de la population protestante de Suisse vit sur le territoire de l’Union synodale Berne-Jura-Soleure. Selon le pasteur Stefan Ramseier, le Conseil synodal de ces Eglises est « pleinement conscient de sa responsabilité vis-à-vis du protestantisme suisse ». Mais la régression du nombre de réformés dans ces Eglises est due à des causes qui échappent en grande partie à leur volonté. En 1970, les protestants représentaient encore plus de 70% de la population résidant dans ces cantons, en 2000, 60% seulement. Proportionnellement, la diminution enregistrée chez les catholiques est bien moindre. Parallèlement, le groupe des personnes ne déclarant aucune appartenance religieuse a progressé et se situe désormais à la troisième place, avant les autres Eglises protestantes et les musulmans.

C’est en particulier dans les villes que le nombre de protestants a reculé. Relativement aisés, les réformés ont souvent les moyens d’aller s’établir à l’extérieur, dans des communes périphériques, alors que certains quartiers urbains connaissent des soucis d’intégration. Mais surtout, l’allongement de la durée de vie et le recul des naissances ont fait augmenter le nombre de membres de l’Eglise âgés et très âgés ; les activités en faveur de cette population sont devenues plus importantes. En outre, près de la moitié des membres appartiennent à la génération intermédiaire (30-64 ans), une population présentant des besoins particuliers qu’il faudra mieux prendre en compte. Cette régression a été d’autant plus sensible que les étrangers venant s’établir en Suisse sont très rarement membres de l’Eglise protestante. Tous ces facteurs ont concouru à ce que ces dix dernières années, l’Union synodale Berne-Jura-Soleure perde près de 92'000 membres. A raison de 44%, ce recul est dû au solde migratoire négatif, c’est-à-dire à une différence croissante entre le nombre de protestants qui ont quitté le canton, majoritaires, et celui de ceux qui s’y sont installés. Bien formée, cette population est attirée par les salaires et les emplois créés à Fribourg, Bâle, Zurich ou dans la région lémanique. En outre, l’excédent de décès comparé au nombre des baptêmes et des sorties de l’Eglise a contribué à cette diminution : d’ici 2030, prévoient les auteurs du rapport, il mourra deux fois plus de protestants qu’il n’en naîtra. Si ce scénario se confirme, les Eglises réformées Berne-Jura-Soleure passeront ces prochaines années du statut d’Eglise majoritaire à celui de plus importante minorité religieuse.

Le Conseil synodal constate que les Eglises BE-JU-SO sont une institution disposant d’une structure bien représentée sur tout le territoire, fonctionnant bien, disposant d’une présence affirmée et de compétences professionnelles variées. Comme Eglise qui se définit comme « semper reformanda » (toujours capable et désireuse de se réformer), elle doit adapter son travail aux réalités actuelles. Même en dynamisant son offre, l’Eglise réformée ne parviendra pas à stopper le recul du nombre de ses membres, mais ne pourra que le ralentir. Ce recul impliquera une adaptation des structures de l’Eglise ; les paroisses, en particulier, devront renforcer leur collaboration. Lorsque le pourcentage des protestants représentera moins de la moitié de la population du canton, l’Union synodale BE-JU-So entend rester une Eglise nationale qui continuera à assumer ses responsabilités, en matière de proclamation de la parole, d’accompagnement spirituel et d’engagement social en faveur des plus faibles.