Pour intégrer les migrants, « les Eglises doivent informer, prendre la parole et résister »

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Pour intégrer les migrants, « les Eglises doivent informer, prendre la parole et résister »

12 mars 2007
A l’occasion de l’étape suisse du troisième rassemblement européen ce week-end, le pasteur français Jean-Arnold de Clermont, président de la Conférence des Eglises Chrétiennes, s’exprime sur le devoir des Eglises face à l’explosion des migrations
Pour le pasteur Jean-Arnold de Clermont, président de la Conférence des Eglises Européennes, mais aussi de la Fédération Protestante de France, «il est important de visualiser le lien entre l’œcuménisme spirituel et la pratique œcuménique, de s’engager concrètement à réfléchir sur des questions touchant aux migrations, à l’unité de l’Eglise ou à la justice et à la paix ». Les ateliers portant sur le rôle de la religion dans l’intégration réussie des personnes migrantes et celui traitant de l’unité de l’Eglise ont attiré le plus de monde ce week-end.

Ce n’est pas un hasard : « L’intégration des migrants est un thème politique très chaud, que ce soit ici en Suisse, en France, en Grèce, en Italie ou en Espagne », commente Jean-Arnold de Clermont. « Nous ne pourrons pas comprendre la communion des Eglises en Europe sans être témoins de l’ensemble des communautés humaines. Le monde compte 200 millions de migrants à l’heure actuelle, et certaines statistiques parlent bientôt d’un milliard. Cela tient au monde globalisé, mais aussi au déséquilibre Nord-Sud, à des régimes totalitaires insupportables. Et il n’est pas acceptable que nous disions à ces gens qu’ils n’ont rien à faire chez nous ; cependant, il ne sera pas possible de développer l’Europe sans un développement équilibré de ces régions du monde. Concrètement, les Eglises doivent faire trois choses : tout d’abord, un travail d’information. La plupart des exactions commises en Europe à l’égard des migrants tiennent à l’ignorance des gens sur la capacité d’accueil d’un pays et le nombre des personnes présentes. Ensuite, une prise de parole publique. En France, l’an dernier, les Eglises ont été les seules qui ont eu le courage de parler pour informer et suggérer des pistes » après le projet de loi Sarkozy sur l’immigration. « Enfin, une action de résistance qui ne tient que si les deux premières étapes ont été solidement établies », quitte à protéger des personnes qui n’ont plus le droit de rester et à le dire publiquement. « Ce travail d’information implique aussi des actions d’alphabétisation et d’accueil des migrants. La Fédération protestante de France a créé un poste d’observateur pour recenser les nombreuses communautés et Eglises étrangères du pays. On compte quelque 400 communautés africaines rien que dans la couronne parisienne. Nous tentons de faire comprendre que ces mouvements, souvent d’obédience évangélique, n’ont rien de commun avec des mouvements sectaires. Notre Fédération comprend près de 1500 associations cultuelles, parmi lesquelles des luthériens, des réformés, des évangéliques et des pentecôtistes, et 80 institutions, œuvres ou mouvements représentant 500 associations. C’est dire que nous connaissons bien ce monde et que nous travaillons avec lui. Depuis des années, nous dénonçons l’ignorance politique et administrative qui, en France, les juge suspects. Ces mouvements, notamment les Eglises africaines évangéliques, ont une responsabilité très importante pour créer du lien social et au lieu de les pourfendre, il faudrait au contraire mieux leur faciliter la vie, car ils ont un rôle d’intégration considérable à jouer ».