Les insolvables limités aux soins d’urgence ? Une idée pour changer la loi dont plus personne ne veut
18 janvier 2007
La suspension de prestations pour primes impayées, prévue par le nouvel art
64a II LAMal, suscite un rejet unanime. Une révision de l’ordonnance sur l’assurance maladie est en cours. Dans ce contexte, Markus Dürr, président de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé, aimerait que la nouvelle carte d’assuré permette de définir s’il a payé ses primes. Si tel n’est pas le cas, « il ne devrait plus avoir accès à l’entier du buffet de prestations ».Entré en vigueur il y a un an, le nouvel art. 64a II LAMal devait mettre la pression sur les assurés solvables qui ne paient pas leurs primes. La suspension de prestations pour primes impayées suscite aujourd’hui un rejet unanime. Assureurs, directeurs cantonaux de la santé, assurés, tous dénoncent l’absence de remboursements dont sont victimes des milliers de personnes en Suisse, avec pour conséquence la mise en danger des plus démunis. Les délais plus brefs de la nouvelle loi sont mis à l’index : « Il n’est pas tolérable que les assureurs puissent cesser leurs prestations aussi tôt, soit dès la réquisition de continuer la poursuite », juge Markus Dürr, président de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé et conseiller d’Etat lucernois. « Dans mon canton, nous comptons déjà plus d’un million de frais d’hôpitaux impayés par les assureurs, qui ne rétribuent plus les soins fournis. »
Le problème est que si certains assurés ne veulent pas payer, d’autres ne le peuvent plus. Pour Markus Dürr, « il faut aussi protéger les prestataires de soins et leur permettre de savoir plus tôt si quelqu’un a payé ses primes d’assurance ou non. La nouvelle carte d’assuré devrait permettre d’obtenir ce renseignement par communication informatique avec les assureurs. Savoir plus vite qu’une personne est insolvable permettrait une prise en charge plus rapide par l’aide sociale. Et ceux qui ne paient pas leurs primes ne devraient pas avoir accès à tout le buffet de prestations. La prise en charge devrait se faire par certains médecins seulement, et être limitée aux soins d’urgence indispensables. » Une telle révision poserait cependant des problèmes liés à la protection des données et à la conformité au droit supérieur : « C’est pourquoi réviser l’ordonnance ne suffit pas, il faudra une révision de la loi ».
« Le DFI donne la priorité à une modification de l'ordonnance sur l'assurance maladie pour trouver une solution aux problèmes d'application du nouveau article 64a de la LAMal que certains cantons ont mis en évidence », répond Andrea Arcidiacono, porte-parole du Département de l’Intérieur. Un groupe de travail comprenant l’Office fédéral de la santé publique, des représentants des cantons et de Santésuisse doit faire des propositions ce printemps.
Mais les assureurs ont une autre manière de voir les choses que les cantons. « On estime que 30% des gens ne peuvent pas payer, et que 70% des cas de contentieux se résolvent après la mise aux poursuites. Sur un contentieux touchant quelque 400'000 personnes en Suisse, cela représente donc environ 100'000 assurés qui ne peuvent pas payer », indique Nello Castelli, porte-parole de Santésuisse, l’organisation des assureurs-maladie. « Les cantons ont une obligation constitutionnelle d’assurer les soins. C’est pourquoi nous proposons que l’aide sociale prenne en charge les primes de ces personnes et qu’ils mettent en place une structure garantissant la prise en charge médicale. » Les cantons renâclent devant les coûts qu'entraînerait la généralisation de ces mesures. « Nous attendons aussi de la révision de l’ordonnance des facilités administratives. Actuellement, l’ordonnance fixe un délai très court, soit quarante jours, pour payer après un rappel. Ensuite, les assureurs doivent intenter une poursuite. Ce délai les empêche de trouver des accords de paiement avec les gens ».
En fait, tous les assureurs n’appliquent pas la loi avec la même rigueur. « Nous appliquons la loi à tous et n’accordons pas de facilités de paiement supplémentaires, nous n’avons pas le choix », justifie Grazia Siliberti, porte-parole de la Visana. Elle souligne que la suspension concerne moins de 2% des effectifs de la caisse, soit quelque 9000 assurés. A l’inverse, la CSS « essaie de trouver un accord avec ses assurés avant de lancer une poursuite. S’ils s’engagent à payer régulièrement une partie des sommes dues, nous n’effectuons pas de suspension », souligne Céline Reymond, porte-parole, qui estime qu’en moyenne 5% du million d’assurés en Suisse ne paie pas ses primes. Helsana possède aussi un service d’aide sociale avec lequel les assurés peuvent conclure un arrangement. « La diversité des directives cantonales n'est pas satisfaisantes et entraîne des inégalités de traitement », juge Thomas Luethi, son porte-parole. « Certains prennent en charge les primes, d’autres les prestations, d’autres encore ne paient rien ». En 2005, Helsana comptait 12,5 millions de dettes pour lesquelles aucun remboursement n'était intervenu. Sur ses 1,325 millions d'assurés, près de 75'000 personnes sont touchées par une suspension de prestations dans l'assurance obligatoire de soins.
Le problème est que si certains assurés ne veulent pas payer, d’autres ne le peuvent plus. Pour Markus Dürr, « il faut aussi protéger les prestataires de soins et leur permettre de savoir plus tôt si quelqu’un a payé ses primes d’assurance ou non. La nouvelle carte d’assuré devrait permettre d’obtenir ce renseignement par communication informatique avec les assureurs. Savoir plus vite qu’une personne est insolvable permettrait une prise en charge plus rapide par l’aide sociale. Et ceux qui ne paient pas leurs primes ne devraient pas avoir accès à tout le buffet de prestations. La prise en charge devrait se faire par certains médecins seulement, et être limitée aux soins d’urgence indispensables. » Une telle révision poserait cependant des problèmes liés à la protection des données et à la conformité au droit supérieur : « C’est pourquoi réviser l’ordonnance ne suffit pas, il faudra une révision de la loi ».
« Le DFI donne la priorité à une modification de l'ordonnance sur l'assurance maladie pour trouver une solution aux problèmes d'application du nouveau article 64a de la LAMal que certains cantons ont mis en évidence », répond Andrea Arcidiacono, porte-parole du Département de l’Intérieur. Un groupe de travail comprenant l’Office fédéral de la santé publique, des représentants des cantons et de Santésuisse doit faire des propositions ce printemps.
Mais les assureurs ont une autre manière de voir les choses que les cantons. « On estime que 30% des gens ne peuvent pas payer, et que 70% des cas de contentieux se résolvent après la mise aux poursuites. Sur un contentieux touchant quelque 400'000 personnes en Suisse, cela représente donc environ 100'000 assurés qui ne peuvent pas payer », indique Nello Castelli, porte-parole de Santésuisse, l’organisation des assureurs-maladie. « Les cantons ont une obligation constitutionnelle d’assurer les soins. C’est pourquoi nous proposons que l’aide sociale prenne en charge les primes de ces personnes et qu’ils mettent en place une structure garantissant la prise en charge médicale. » Les cantons renâclent devant les coûts qu'entraînerait la généralisation de ces mesures. « Nous attendons aussi de la révision de l’ordonnance des facilités administratives. Actuellement, l’ordonnance fixe un délai très court, soit quarante jours, pour payer après un rappel. Ensuite, les assureurs doivent intenter une poursuite. Ce délai les empêche de trouver des accords de paiement avec les gens ».
En fait, tous les assureurs n’appliquent pas la loi avec la même rigueur. « Nous appliquons la loi à tous et n’accordons pas de facilités de paiement supplémentaires, nous n’avons pas le choix », justifie Grazia Siliberti, porte-parole de la Visana. Elle souligne que la suspension concerne moins de 2% des effectifs de la caisse, soit quelque 9000 assurés. A l’inverse, la CSS « essaie de trouver un accord avec ses assurés avant de lancer une poursuite. S’ils s’engagent à payer régulièrement une partie des sommes dues, nous n’effectuons pas de suspension », souligne Céline Reymond, porte-parole, qui estime qu’en moyenne 5% du million d’assurés en Suisse ne paie pas ses primes. Helsana possède aussi un service d’aide sociale avec lequel les assurés peuvent conclure un arrangement. « La diversité des directives cantonales n'est pas satisfaisantes et entraîne des inégalités de traitement », juge Thomas Luethi, son porte-parole. « Certains prennent en charge les primes, d’autres les prestations, d’autres encore ne paient rien ». En 2005, Helsana comptait 12,5 millions de dettes pour lesquelles aucun remboursement n'était intervenu. Sur ses 1,325 millions d'assurés, près de 75'000 personnes sont touchées par une suspension de prestations dans l'assurance obligatoire de soins.