Des dispenses d’école pour le temps de Noël ? Cela doit rester l’exception

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Des dispenses d’école pour le temps de Noël ? Cela doit rester l’exception

1 décembre 2006
Confronté à la demande de dispenses de cours formulées par des parents d'élèves musulmans, Daniel Christen, directeur général de l'enseignement obligatoire vaudois, entend limiter les absences à la fête de Noël précédant les vacances
Dans le Jura bernois et à Neuchâtel, le débat anime le courrier des lecteurs des quotidiens.« Notre sapin était le plus haut de l'école et nous l'avons décoré avec l'aide du concierge » : Lucile, 7 ans, évoque avec plaisir la fête de Noël organisée dans son école primaire des environs de Lausanne. Elle a préparé avec ses camarades de classe un calendrier de l'Avent, avec une petite surprise pour chaque enfant. Etoiles, bricolages, chants de Noël se succèdent durant le mois de décembre dans les écoles primaires: « Je considère qu'il s'agit d'un événement qui fait partie de notre culture plutôt que d'une fête religieuse, que les enfants et leurs familles attendent en ce moment de l'année », estime Daniel Christen, directeur général de l'enseignement obligatoire vaudois. Il a été interpelé l'an dernier par de parents d'élèves musulmans qui souhaitaient voir leur enfant dispensé d'école durant le mois qui précède le 24 décembre, pour leur éviter de se trouver confrontés aux activités liées à l'Avent et aux préparatifs de Noël. Durant cette fête, un accent particulier mis sur la filiation divine de Jésus peut heurter la sensibilité religieuse de personnes de confession musulmane. Si l’Islam considère Jésus comme un prophète, il ne lui accorde pas la place prééminente qu’il a dans le christianisme.

Le département vaudois de la formation et de la jeunesse tient désormais des recommandations à disposition des enseignants sur le site destiné à la gestion des établissements scolaires. Il a également rédigé un avis de droit sur les congés scolaires pour motifs religieux.

Pour Daniel Christen, si l' « on peut comprendre qu'il faut respecter les croyances des élèves et de leurs parents, à qui l'on ne va pas faire célébrer des fêtes qui ne sont pas les leurs », il n'est pas question d'accorder une dispense générale pour tout le mois qui précède Noël. « La cérémonie du sapin, le vendredi qui précède les vacances, peut en revanche être assimilée à une période hebdomadaire d'histoire biblique. Les parents d'autres confessions peuvent, sur simple demande, dispenser leurs enfants de cet enseignement. » De même, selon la recommandation, certains chants de Noël contiennent des messages religieux contraires aux convictions de certains, et une dispense particulière « constitue parfois la meilleure manière de préserver les intérêts de tous ». On recherchera le dialogue avec les parents ; l'octroi de dispenses restera l'exception.

Si l'école est neutre du point de vue confessionnel et doit tenir compte des sensibilités de tous les enfants présents, elle ne peut pour autant faire abstraction des fêtes civiles et religieuses qui ponctuent l'année scolaire, affirment les recommandations du groupe de travail interservices religions du Département vaudois des institutions et relations extérieures (DIRE).

Dans le Journal du Jura et l’Express, des courriers des lecteurs sur le même sujet suscitent depuis fin octobre un débat nourri. A l’origine de cette polémique, Sandrine Nobs, une habitante de Nods près de Bienne, relate deux événements survenus à Neuchâtel, mettant aux prises des institutrices souhaitant fêter Noël et des parents d’élèves musulmans qui s’y opposent. Dans une classe d’élèves de cinq ans, les parents d’une petite musulmane se disaient fortement dérangés que l’on parle de Jésus et de tout ce qui le concerne devant leur fille. Ils acceptaient toutefois qu’un sapin soit décoré, «parce que c’est joli ». Au terme d’une réunion de parents d’élèves plus âgés, une maîtresse se serait heurtée aux protestations de nombreux parents d’élèves musulmans, jugeant intolérable de faire une fête pour Noël en classe.

Catholique d’origine, Sandrine Nobs dit avoir reçu « au moins 50 téléphones et 10 courriers » de parents, d’enseignants et de personnes âgées évoquant leurs propres anecdotes. « Reconnaître les autres est louable, mais il ne faut pas museler notre culture chrétienne. La tolérance ne doit pas être à sens unique ». « On oublie que d’autres communautés, comme les témoins de Jéhovah, ne participent pas à Noël ni aux anniversaires », tempère Noémie Noirat, institutrice à Bévilard, dans le Jura bernois. « Il faut trouver pour ces enfants d’autre bricolages, afin que l’excuse religieuse ne soit pas le prétexte à refuser une activité ». « Le canton de Neuchâtel est laïque », rappelle de son côté Jean-Claude Marguet, chef du service de l’enseignement obligatoire, « mais il est légitime que les maîtres utilisent la forte tradition de Noël dans les activités scolaires, tout en respectant les convictions religieuses de chacun. Proposer un choix d’activités est possible ; on ne demandera pas à un élève musulman d’apprendre un poème sur la crèche si ses parents le contestent. » Il souligne l’approche comparative et historique des différentes religions proposée à Neuchâtel, ainsi que l’existence de la communauté de travail pour l’intégration des étrangers, qui devrait discuter cette question de la fête de Noël cette semaine avec les musulmans (3247 signes) (ProtestInfo/Sylvie Fischer)