"Protestants, catholiques, Juifs : deux siècles de vie quotidienne dans le canton de Vaud": Une expo pour montrer le chemin parcouru, de la méfiance au dialogue

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"Protestants, catholiques, Juifs : deux siècles de vie quotidienne dans le canton de Vaud": Une expo pour montrer le chemin parcouru, de la méfiance au dialogue

21 avril 2004
« Protestants, catholique et Juifs, deux siècles de vie quotidienne dans le canton de Vaud » : l’exposition qui se tient à l’Hôtel de Ville de Lausanne depuis le 22 avril montre comment les 3 communautés ont cohabité de 1803 à nos jours en terre vaudoise, comment elles se sont confrontées et ont peu à peu surmonté crispations, persécutions et conflits à travers un véritable dialogue empreint de respect réciproque qui a débouché sur des réalisations communes
Prenant prétexte de l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution vaudoise qui reconnaît les Eglises réformées et catholique comme institutions de droit public et la communauté israélite comme institution d’intérêt public, la Commission de coordination « Eglises et judaïsme » a imaginé de présenter une approche historique et sociologique, mais non religieuse, des relations qu’entretinrent protestants, catholiques et israélites pendant ces 2 siècles.

Pas question pour les commissaires de l’exposition, l’historien Bruno Corthésy et l’historien de l’art Dave Lüthi, de présenter une histoire séparée des 3 communautés mais bien plutôt de s’attacher aux points d’interaction, de rencontres et de friction, de débusquer tout ce qui a pu créer notamment un malaise dans la relation des Eglises avec la communauté juive. Président de la Commission de coordination, le pasteur Pascal Veillon a rappelé lors de la conférence de presse de ce mercredi, que les discussions pour le moins animées, suscitées au sein de la Constituante à propos de la rédaction des jos_content 169 et suivants qui prennent en compte la dimension spirituelle de la personne humaine, reflétaient non seulement les différentes positions politiques en jeu, mais aussi « une longue série de conflits, de compromis, voire de persécutions » qui jalonnèrent les deux siècles passés. Et les musulmans ?Si les commissaires n’ont pas inclus les musulmans dans leur exposition, c’est parce que la Constitution, qui ouvre désormais la porte à d’autres dénominations confessionnelles et religieuses, n’accorde pas, pour le moment, de statut officiel à l’islam.

A l’entrée de l’exposition, un moulage en plâtre d’une allégorie de l’Evangile, accueille le visiteur. La statue fut réalisée en 1909 par le sculpteur Raphaël Lugeon pour remplacer la Vierge à l’Enfant qu’il avait prévue pour orner le trumeau du portail occidental de la cathédrale de Lausanne. La Vierge avait soulevé un tollé d’indignation et avait été refusée par un décret du Conseil d’Etat, jugée par trop « catholique ». Cette seconde statue restera aussi dans l’atelier du sculpteur.

Les rapports vont toutefois évoluer entre catholiques et protestants. En témoigne cette photographie montrant l’Eglise catholique du Valentin sans son clocher actuel, telle qu’elle avait été construite par Henri Perregaux, qui avait dû respecter l’interdiction faite aux Eglises non réformées d’afficher des signes extérieurs de leur confession. Le clocher que l’on connaît aujourd’hui a pu être érigé bien plus tard, quand les tensions ont été moins vives et que les restrictions ont été levées. L’exposition présente aussi les controverses provoquées par les projets de vitraux d’artistes catholiques et protestants proposés pour la Cathédrale. Ils eurent leurs détracteurs et leurs supporters qui rédigèrent une pétition pour appuyer les travaux refusés. Difficile aujourd’hui de distinguer clairement les œuvres des artistes catholiques de celles des protestants.

Singulièrement, l’exposition passe sous silence les conflits qui opposèrent les différentes dénominations protestantes à l’Eglise évangélique réformée officielle.

L’exposition rappelle une page sombre de l’histoire de l’Eglise réformée vaudoise avec les propos antisémites lancés en janvier 1939 dans Le Semeur Vaudois par le pasteur Charles Clot, qui ne fut jamais désavoué par sa hiérarchie. C’est à cette époque qu’entre en Suisse un grand nombre de réfugiés juifs venus d’Alsace et de Pologne, qui sont à l’origine des communautés israélites d’Avenches et de Lausanne. La Confédération imposa de multiples restrictions à leur admission et ne leur concéda pas le statut de réfugiés politiques. Par conséquent, ils furent à l’entière charge de la communauté israélite de Suisse. Des épisodes peu reluisants qu’il est bon de garder en mémoire pour pouvoir envisager plus sereinement l’avenir. Qui sera forcément multiculturel et multireligieux.