Des vacances plus proches, mais plus personnalisées

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Des vacances plus proches, mais plus personnalisées

Camille Andrès, Nicolas Meyer, Joël Burri
2 juillet 2020
La crise sanitaire impose à beaucoup de renoncer à partir à de lointains voyages. Mais tant internet que les rayons spécialisés des librairies regorgent d’idées pour voyager autrement. Des escapades qui vous ressemblent davantage.

On mise sur... l'inconnu

FAMILLE La pire chose à affronter au quotidien avec les enfants? La frustration. Pour s’éviter d’avoir à faire face à des espoirs déçus et à des attentes non rencontrées au cours de cet été peu commun, on se simplifie la vie en privilégiant des activités… imprévisibles!

L’idéal? Les chasses au trésor. Pour s’éviter de construire des circuits, on se base sur des parcours existants, en Valais avec les parcours de Valais, Tourisme au cœur de Lausanne avec le livre de Caroline et Pierre Corajoud (voir ci-dessous). On peut aussi se lancer dans un grand jeu de piste intercantonal avec suissepiste.ch, qui permet de construire tout un séjour autour d’une quête: surprises garanties!

Après cette période de confinement, on privilégie pour les plus jeunes «la détente et les activités à l’extérieur» conseille Monique Ryf, responsable régionale Suisse romande Pro Juventute. Les derniers mois ont été marqués par les obligations, les interdits, la nécessité de s’organiser? «On met l’accent sur le jeu libre, sans contraintes.» Et s’il n’est pas forcément possible de faire «garder» les enfants cet été, les villes et les régions mettent sur pied quantité d’activités à la journée ou à la semaine. Dans le canton de Vaud, et dans l’Arc jurassien, Pro-Juventute dispose d’un fonds pour financer ces activités si les parents n’ont pas les moyens.

Des voyages sans obstacles

HANDICAP Les personnes en situation de handicap le savent bien: on a beau avoir anticipé un déplacement, on se retrouve toujours devant un obstacle imprévu… On ne s’en rend pas compte, mais la situation sanitaire peut largement compliquer les choses pour les personnes vulnérables: «l’organisation spatiale de différents lieux est chamboulée et cela peut constituer de nouveaux obstacles ou au contraire offrir de nouvelles opportunités pour les personnes à mobilité réduite. L’orientation de personnes malvoyantes ou aveugles est également touchée. Pour les personnes avec une déficience intellectuelle, il est important que les mesures soient communiquées clairement. Le port du masque et la difficulté à comprendre les interlocuteurs, notamment l’impossibilité de lecture labiale, touchent les personnes malentendantes ou sourdes», précise Marc Butticaz, collaborateur scientifique chez Pro Infirmis. L’organisme vient de finaliser une carte interactive qui recense tous les lieux accessibles aux personnes handicapées en Suisse. Près de 6000 sites ont déjà été vérifiés, de la largeur des portes à la présence de rampes. SwissMobile répertorie les chemins sans obstacles. 

Les organisations sont nombreuses, parmi elles, Procap développe des offres de loisirs spécifiques. L’essentiel est surtout de pouvoir compter sur un accompagnant disponible, qui, dans un certain nombre de cas, peut bénéficier de réductions, voire de gratuité. 

Et si l'on dormait à la ferme?

TOURISME VERT Envie d’une vie en plein air, rythmée par la course du soleil? L’agritourisme, poussé par la tendance vers un tourisme durable et responsable a connu un essor en 2019, marqué par la vague verte et «l’effet Greta». En 2020, la pandémie pourrait bien donner des ailes à ce secteur, puisque l’envie de vacances actives et au grand air explose, tout comme la volonté de mieux connaître l’agriculture – et qui sait, d’apprendre à cultiver ou à traire et à nourrir des animaux, 170 fermes offrent la possibilité de participer aux travaux quotidiens, pour les plus motivés. Dans notre pays, les régions phares pour cette activité restent le lac des Quatre-Cantons, la Suisse orientale ou la région de Zurich. Mais les Franches-Montagnes (Jura) comptent aussi une trentaine de fermes le long des «chemins du bio». A noter que souvent, ce sont des exploitations innovantes qui offrent cette activité, principalement gérées par des agricultrices qui s’investissent beaucoup sur leur exploitation et en tirent jusqu’à un tiers de leurs revenus. Les fermes proposent tous types d’hébergement: tipis, tentes, lits dans la paille, cabanes, roulottes, on peut aussi apprécier le confort d’une chambre, louer un dortoir en famille et parfois même un logement séparé! Si un site convivial et pratique existe (voir-ci dessous), le plus simple et le plus courant reste encore tout simplement de contacter votre hôte directement. En effet, contrairement à d’autres solutions touristiques qui ont tendance à éliminer toute interaction, ici, place aux relations et aux échanges personnels avec la famille qui vous accueille chez elle! 

Sur le chemin des Huguenots

HISTOIRE Durant cet été, pourquoi ne pas redécouvrir une histoire de réfugiés, souvent méconnue, qui a contribué à forger notre nation? A la suite de la révocation de l’Edit de Nantes en 1685, les protestants français sont contraints de fuir leur pays pour éviter les persécutions dont ils sont victimes. Leur exode va passer par la Suisse. Nombre d’entre eux vont choisir de s’y établir en amenant leurs savoir-faire. En mémoire de cette époque, un itinéraire culturel européen a été défini. De nouveaux tronçons s’y ajoutent chaque année. En Suisse romande, de très belles balades entrecoupées d’apports culturels et de notes historiques valent le détour. Départ du parcours à Genève, lieu de rassemblement des huguenots qui vont ensuite longer les rives du lac Léman pour rejoindre Lausanne, point de convergence de la suite des itinéraires. La majorité d’entre eux trouveront ensuite refuge en pays de Neuchâtel qui accueillera ou verra passer des milliers de réfugiés. Ceux qui poursuivront leur périple se rendront à Bienne et à Berne pour rejoindre la Suisse alémanique vers Zurich et Schaffhouse. D’autres choisiront de bifurquer bien avant pour l’Italie et créeront la communauté des Vaudois du Piémont. 

Les ambiguïtés du volontourisme

SOLIDARITÉ Voyager en donnant de sa personne? Une belle idée, mais qui peut contribuer à renforcer des stéréotypes explique Mélissa Girardet anthropologue, et auteure d’un livre sur le sujet. 

Comment définir le volontariat touristique? 

D’un point de vue scientifique, ce néologisme désigne des pratiques à l’étranger: un séjour d’une certaine durée au sein d’un projet de développement ou communautaire, voire une visite de tels projets pour en devenir donateur. 

Pourquoi le pratique-t-on? 

Lors de mon enquête sur le sujet, la motivation principale avancée par les personnes interrogées était de faire des vacances utiles, de consommer différemment que par le tourisme de masse. En analysant les propos, on se rend cependant compte que le volontourisme reste une consommation de l’ «ailleurs». Etant généralement pratiqué dans les zones rurales, il est perçu comme le lien avec «l’authenticité» d’un pays. Ce qui pose la question de ce qui est le propre d’une culture donnée… Enfin, on réalise que ce n’est pas tant le projet qui motive les volontouristes mais le pays où il a lieu, le voyage. Par bien des aspects, le volontourisme contient toujours la recherche d’un dépaysement, d’un exotisme. 

Osez les «vacadoms»

CHEZ SOI «Le tourisme est par nature un état d’esprit», écrit Johan Idema, auteur de De l’art d’être un bon touriste. L’opus propose d’explorer à chaque fois en quelques pages 28 thèmes pour voyager de façon enrichissante et responsable. Et le tout premier: c’est de ne pas négliger «les vertus du surplace», bref de s’offrir des «vacadoms», mot-valise désignant les vacances à domicile. 

Si le tourisme est un état d’esprit, les vacadoms impliquent un regard différent: ce musée devant lequel vous passez tous les jours pour aller au travail, l’avez-vous déjà visité? N’hésitez pas à consulter les offices du tourisme de votre propre région et visitez les sites touristiques dans lesquels vous n’avez jamais mis les pieds! D’ailleurs, vous pouvez appliquer à vos vacadoms les différents conseils de l’ouvrage, tels que ne pas sous-estimer les banalités, explorer les quartiers résidentiels ou aller à la rencontre d’autres touristes. 

Même le célèbre guide de voyage Lonely Planet surfe sur la tendance des vacadoms. «L’Art de voyager sans partir loin», propose «50 micro-voyages à expérimenter près de chez soi»: explorez votre ville en suivant les conseils de vos amis sur les réseaux sociaux, allez admirez les plus beaux graffitis de votre localité ou faites une liste de préjugés que vous avez sur cette dernière avant de partir à la recherche de tout ce qui pourrait les démentir.