A Martigny, la culture religieuse se transmet en tandem

Chaque personne intervenant en ECR, comme Gwendoline Noël-Reguin, ici en train de raconter l’histoire de Théodule, suit une formation pédagogique de base de trois ans et une formation théologique assurée par son Eglise. / ©Camille Andres
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Chaque personne intervenant en ECR, comme Gwendoline Noël-Reguin, ici en train de raconter l’histoire de Théodule, suit une formation pédagogique de base de trois ans et une formation théologique assurée par son Eglise.
©Camille Andres

A Martigny, la culture religieuse se transmet en tandem

Binôme
Dans les écoles primaires valaisannes, les cours d’éthique et cultures religieuses sont dispensés par des intervenant·e·s des Eglises catholiques ou réformées. Reportage à Martigny.

«Aujourd’hui, on va faire connaissance avec Théodule»… et non saint Théodule! Toute la nuance est là: présenter le «saint patron du Valais», dans une perspective historique. C’est l’objectif que s’est fixé Gwendoline Noël-Reguin, intervenante d’éthique et de culture religieuse (ECR), qui travaille ce matin de mars dans une classe de 7e HarmoS (10 - 11 ans). A ses côtés, Nathalie Pitteloud Pistorius, est aussi attentive que ses élèves, qu’elle recadre gentiment, tant ils sont empressés à s’exprimer. Il faut dire qu’ils connaissent bien Gwendoline, qui les accompagne parfois en sortie scolaire. Entre les deux professionnelles, on sent une réelle complicité. Et une vision transversale du métier. Quand Gwendoline explique que Théodule franchit «le pont du diable», Nathalie s’empresse de rendre sa jeune troupe attentive à ce motif: «On va en parler lors du prochain cours d’histoire sur les mythes et les légendes.»

Des intervenants ecclésiaux

Cette collaboration étroite n’est pas la règle dans toutes les classes qui accueillent des intervenant·e·s ecclésiaux, comme Gwendoline Noël-Reguin. Missionné·e·s et formé·e·s par les Eglises réformée ou catholique, y compris pour la pédagogie, ils et elles sont chargé·e·s des cours d’ECR en Valais, comme le prévoit une récente convention signée en ce sens par l’Etat du Valais et les Eglises catholiques romaines et reformées. Désormais non confessionnels et centrés sur le fait religieux, leurs cours ne feront plus l’objet d’une dispense dès la rentrée 2021.

La présence de ces figures issues des Eglises fait grincer quelques dents. D’autant plus que des formations continues dans le domaine, validées par la Haute Ecole pédagogique, sont désormais aussi accessibles aux enseignantes et enseignants. De son côté, Nathalie Pitteloud Pistorius s’avoue ravie de la présence de Gwendoline Noël-Reguin, «essentielle pour montrer aux enfants qu’une adulte ne sait pas tout! Le savoir est multidisciplinaire, c’est important de leur indiquer cette diversité».

Expliquer et raconter

Et effectivement, Gwendoline Noël-Reguin trouve les mots simples et les techniques précises pour répondre aux questions les plus pointues, qu’il s’agisse d’expliquer à quoi correspondaient des études de «théologie» que Théodule avait suivies, ou de situer l’époque de sa vie – autour de l’an 380 – sur un mètre qu’elle utilise à chaque séance, où un millimètre égale un an. Et les enfants d’en déduire par eux-mêmes qu’au temps du saint patron valaisan, l’islam – qu’ils ont étudié avec Gwendoline en début d’année – n’était pas encore né!

Le personnage de Théodule est d’ailleurs propre à l’enseignement de culture religieuse valaisanne: ici, les «compléments valaisans» occupent cinq des trente-cinq séances annuelles d’ECR. Ces sessions dédiées aux particularités religieuses et patrimoniales locales privilégient- elles l’histoire catholique locale? Pas forcément. D’autres compléments permettent de découvrir le panorama religieux du Valais, temple bouddhiste de Martigny inclus.

La pédagogie choisie par l’intervenante, elle, peut rappeler celle utilisée au catéchisme: après avoir raconté trois histoires édifiantes de Théodule, elle utilise un objet-phare pour fixer l’attention des élèves – ici un serpent en plastique, rappelant le reptile qui aurait mordu un enfant guéri par le saint. Puis, elle demande aux jeunes de restituer l’un des récits, sous forme d’un dessin ou d’un sketch. Inutile de dire que toute la classe ou presque se bat pour incarner Théodule pourfendeur de serpents! L’enjeu du cours est de permettre aux élèves de s’approprier le personnage. Pour Gwendoline, c’est gagné. Quarante-cinq minutes plus tard, l’animal sous le bras, elle file déjà vers une autre classe.